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ACTUALITES

Après l’ouragan, Haïti affronte la famine et le choléra


- 11 Octobre 2016


L’un des pays les plus pauvres est à nouveau confronté à un risque humanitaire majeur. Témoignage d’un membre de la Croix-Rouge suisse


En Haïti, moins d’une semaine après les ravages provoqués par le passage de l’ouragan Matthew, la population est une nouvelle fois menacée de basculer dans une crise humanitaire majeure. Dans le sud du pays, l’accès à l’eau, à la nourriture et à des abris devient problématique. Dimanche, un convoi d’aide alimentaire a été pris d’assaut, ainsi qu’un hélicoptère d’humanitaires. «La situation sécuritaire est très préoccupante, explique François Dessambre, chef de la délégation de la Croix-Rouge suisse à Léogâne, situé à quelques kilomètres à l’ouest de la capitale Port-au-Prince. Dans certains endroits, les gens sont dans un état de désespérance.» Un constat qui contraste avec le discours des autorités du pays. Lundi, le gouvernement comptabilisait 372 morts, et refusait toujours de déclarer l’état d’urgence. «On ne l’a pas fait pour éviter une utilisation du budget de la République qui ne serait pas tout à fait dans les normes», a déclaré à l’AFP le ministre de l’Intérieur François Anick Joseph. Le bilan pourrait pourtant être beaucoup plus important, les acteurs du terrain évoquant par exemple plus de 600 morts dans une seule petite région montagneuse. Récoltes détruites A défaut d’une aide alimentaire importante, les émeutes de la faim pourraient rapidement se propager. L’ouragan a en effet frappé le grenier du pays, les récoltes étant par endroits détruites à 80%. Dimanche soir, la police nationale demandait aux ONG de signaler les déplacements de convoi pour les accompagner d’une escorte. Une pratique qui va à l’encontre des règles humanitaires. Dans l’immédiat l’urgence est l’accès à l’eau potable avec le spectre d’une flambée de choléra. «Plus les informations remontent, plus le problème grandit, c’est très inquiétant, poursuit François Dessambre. On parle également de cas de tétanos.» Résurgence du choléra Le choléra, la population a appris à vivre avec depuis que cette maladie est réapparue dans les pays en 2010, peu après le tremblement de terre qui avait provoqué la mort de plus de 200 000 personnes. Une première épidémie avait alors tué environ 10 000 personnes. Depuis, chaque année, à la saison des pluies, la maladie emporte quelques centaines de personnes. «La population connaît les pratiques d’hygiène pour s’en prémunir, explique François Dessambre. Mais elle manque de savon, certains n’ont pas de toilettes. Le choléra, c’est la maladie du pauvre, la pauvreté c’est la normalité à Haïti.» Les humanitaires se préparent déjà à un plan d’action pour la gestion des cadavres, le plus grand danger de propagation rapide de la maladie. La Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge a mobilisé un premier fonds d’aide d’urgence à Haïti de 6,8 millions de francs. La priorité ira l’achat de produits de purification d’eau et de système de filtrage. L’ONU parle de deux millions de personnes touchées par les inondations et a lancé un appel d’aide pour 120 millions de dollars. Responsabilité de l’ONU L’ONU se sent d’autant plus concerné que l’organisation est indirectement responsable du retour de la maladie en Haïti. Des enquêtes scientifiques montrent en effet que c’est bien un bataillon de la Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti (Minustah) venu du Népal qui est à l’origine de sa transmission dans un pays qui n’avait plus connu d’épidémie depuis 150 ans. Un fait que n’a reconnu l’ONU qu’à demi-mot cet été. De passage à Genève la semaine passée, le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon a réitéré ses regrets et rappelé la «responsabilité morale» de l’organisation. Il s’est engagé à ce que l’ONU aide les malades, stoppe le choléra et soutienne les victimes et leurs familles. «J’espère que les Etats membres vont approuver mes nouvelles approches», a-t-il dit en précisant que jusque-là ce n’avait pas été le cas. «C’est l’un de mes deux grands regrets avec les violences sexuelles des Casques bleus», a ajouté le Sud-Coréen qui arrive au terme de son mandat. «Bientôt la vérité» Les dédommagements pour les victimes pourraient théoriquement s’élever à 40 milliards de dollars, écrivait Le Monde en août dernier, raison pour laquelle l’ONU se retranche pour l’heure derrière son immunité. Une résurgence massive de la maladie en Haïti ne manquerait pas de remettre en lumière les manquements de l’organisation. Pour l’heure, l’urgence est à l’action des secours. Après le retrait, ces dernières années de nombreuses ONG, le gouvernement promet de garder la main sur l’organisation de l’aide qui commence à arriver dans les régions coupées du monde. «On connaîtra bientôt la véritable ampleur des dégâts. Le bilan des morts devrait monter jour après jour», craint François Dessambre. Amérique du Sud Frédéric Koller



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