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AFRIQUE

DJIBOUTI : Vingt cinq après, la page sanglante de l’attentat du café de Paris, le régime dictatorial, dit ne rien regretter


Alwihda Info | Par Mohamed Qayaad - 27 Septembre 2016


"Je n’ai rien dit" est un texte du pasteur Martin Niemöller (1892–1984) écrit à Dachau, dans lequel il dénonçait la lâcheté des intellectuels allemands sur les crimes des nazis au pouvoir. En récrivant ce texte : "Quand ils sont venus chercher les habitants du quartier 5, je n'ai rien dit, je n'étais pas du quartier 5. Quand ils sont venus chercher les habitants d’Arhiba, je n'ai rien dit, je n'étais pas d’Arhiba. Quand ils sont venus chercher les cheikhs, je n'ai rien dit, je n'étais pas cheikh. Quand ils sont venus chercher les habitants de Buldhuqo, je n'ai rien dit, je n'étais pas de Buldhuqo. Puis ils viendront me chercher, et il ne restera plus personne qui voudra ou pourra protester."


DJIBOUTI : Vingt cinq après, la page sanglante de l’attentat du café de Paris, le régime dictatorial, dit ne rien regretter
Le Jeudi 27 Septembre 1990, à 22h45, un attentat a été commis par quatre hommes arrivés à bord d’un taxi contre deux cafés de la place du 27 Juin à Djibouti. Cet attentat causa la mort d’un enfant français et blessa une dizaine d’autres. L'attentat du café de Paris constitua une immense tragédie à Djibouti, et mes pensées vont vers ceux qui ont perdu la vie, vers ceux qui ont été torturés, vers ceux qui ont été blessés ainsi qu'aux familles et aux proches qui ont traversé ces moments douloureux avec beaucoup de courage. Près de vous en pensée dans ces moments terribles et à tous ceux qui sont éprouvés dans leur chair, leur âme, leur affection. Oui, je pense à vous, mes frères et mes sœurs, je pense à ce que vous avez enduré, je pense à vos familles, vos conjoints et vos enfants, à leurs larmes, à leur détresse, et mes larmes coulent. Combien de temps ceux qui sont éveillés vont-ils faire semblant de dormir? Pourquoi? C'est la résultante de l'indifférence, du silence et de la passivité. Aujourd’hui encore, les noms des victimes n’apparaissent sur aucun monument, le nombre des victimes demeure l’objet de contestations, les archives concernant l’événement peu accessibles, les témoins rares. De toute évidence, c'est une chose de reconnaître une défaillance historique collective, c'en est une autre d'en tirer les bonnes leçons. Et pourtant, pas une seule personne du régime dictatorial n’a jamais dû rendre de compte pour ce qui est arrivé à ces personnes. On ne dira jamais assez combien ces crimes, évocateurs de bien d’autres, ont contibué au consensus relatif dont a bénéficié, ce régime tortionnaire. Ce dernier accuse de cet attentat une communauté djiboutienne, les Somalis Samarones. Plusieurs membres de cette communauté furent torturés, déportés et liquidés. Ce régime liberticide espère t-il pouvoir éluder de cette façon la question des citoyens Gadaboursis massivement torturés et qui souffrent encore des séquelles de ces exactions gratuites? Escompte t-il réellement que ces personnes originaires de ce pays et qui subissent une ségrégation abjecte et tous azimuts depuis notre indépendance vont, une fois de plus, succomber à sa démagogie? Il y a là une volonté claire d’occulter une période durant laquelle les djiboutiens furent largement divisés. Cette politique fasciste peut se résumer comme suit: intimidation, humiliation organisée et systématique de tous les Samarones, simplement parce qu’ils sont Samarones et donc tenus collectivement pour responsables de l’attentat qui a eu lieu à Djibouti le 27 Septembre 1990. Il est tout à fait scandaleux que l'Etat djiboutien refuse de s’excuser officiellement et de demander le pardon et d’exprimer sa repentance auprès des hommes et des femmes qui n’en demandent pas plus. Seuls ceux qui ont été torturés peuvent pardonner à leurs tortionnaires! Seuls ceux qui ont subi la torture savent ce que c'était. Les autres ne le sauront jamais. La vague de répression - des Samarones qui furent traités comme des bandes de malfrats pourchassés par la police de la dictature et ses milices -, faisait apparaître en pleine lumière la réalité du système djiboutien. Certains ont été arrêtés, torturés, et écroués à l’issue d’une procédure n’ayant jamais respecté les standards des procès équitables. C'est à se demander si on pourra jamais s'en passer. Et pourtant, il y en aurait des choses à dire! Mais pas envie. Ce régime détestable a usé de méthodes inadmissibles à l'encontre de tous ces personnes.Mais j'ai beau avoir du mal à comprendre ce qu'ils ont pu bien avoir à faire dans cet attentat, l'entreprise de diabolisation dont ils ont fait l'objet me soulève le cœur, car elle surfait sur les fantasmes d'invasion les plus malsains et les plus délirants.Pa-thé-ti-que! Mais qu’importe: la cause est entendue. Il faut bien constater que, de plus en plus, pour les agitateurs enragés de l'épouvantail ethnico-tribal, la vérité et les faits n'ont strictement aucune importance. Ainsi s’ajoute à l’idée nauséabonde à la base de son projet une audace remarquable qui se vautre avec délectation dans la démesure et l’outrance aussi bien par sa forme que son fond. Les jolis cœurs adeptes du langage châtié de Shakespeare deviennent des psychopathes, nymphomanes, zombies, tueurs sanguinaires. Un tel paradoxe n’émeut guère le despote: « Faîtes ce que je dis, pas ce que je fais », voilà qui résume son attitude. Il y a l'impossibilité d'obtenir justice pour les victimes dont beaucoup sont aujourd'hui morts des séquelles et leurs familles peuvent toujours demander que justice soit rendue.Cette impunité permet à ces crimes de se perpétuer. N’avez vous pas remarqué l'absence de poursuites judiciaires à l'encontre de ces tortionnaires? Pourquoi ces criminels ne sont ils pas inquiétés à ce jour? Cependant, faut-il pour autant renoncer à s'interroger? Pourquoi ceux qui étaient en position d’autorité - l’ex dictateur Hassan Gouled Aptidon, l’ancien ministre de l’intérieur Khaireh Allaleh Hared et celui qui s'était autoproclamé président élu IOG (responsable des services secrets à l’époque) - impliqués dans les atrocités terribles conduites à Djibouti, n’ont jamais été jugés? Autant de questions auxquelles il faudra répondre un jour.Le responsable de l'époque de la sécurité a tout fait pour en finir avec cette histoire, à n'importe quel prix afin de ne pas perturber les défaillances et les procédures contradictoires. Bref , les vrais responsables ne seront jamais véritablement sanctionnés. Jamais je n'oublierai ce massacre d'un régime contre une communauté, les Gadaboursis, qui est ses propres citoyens. “La neutralité aide l'oppresseur, jamais la victime. Le silence encourage le persécuteur, jamais le persécuté” disait le philosophe Elie Wiesel.



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