Yémen : l’intervention militaire de la coalition arabe critiquée de tout bord

Mardi 31 Mars 2015

Au moins 45 personnes ont été tuées et 65 blessées dans un raid aérien qui a touché lundi un camp de déplacés de la province de Hajja, dans le nord-ouest du Yémen.


Yémen : l’intervention militaire de la coalition arabe critiquée de tout bord

Pablo Marco, le chef du programme de Médecins sans frontières (MSF) pour le Moyen-Orient, a assuré qu’il y avait certainement « davantage de morts » dans le camp.


Les ambulances ont eu des difficultés à parvenir au camp d’Al-Mazrak, qui se trouve à moins de dix kilomètres d’un camp militaire et qui abrite depuis 2009 des Yéménites déplacés par le conflit entre les Houthis et le gouvernement central, en raison de bombardements de la coalition sur la route qui mène au camp.


Depuis le commencement des raids de la coalition arabe, 500 nouvelles familles ont rejoint le camp d’Al-Mazrak… C’est ce qui a été affirmé par Pablo Marco, le responsable du MSF.


Ban Ki-Moon appelle à trouver une solution pacifique au Yémen


Jeudi dernier, une coalition de neuf pays arabes conduite par l’Arabie saoudite a lancé des raids aériens au Yémen pour empêcher les Houthis d’instaurer un régime chiite, pro-Iran, dans ce pays frontalier du royaume saoudien.


Samedi, le secrétaire général de Nations unies Ban Ki-moon a appelé à une résolution « pacifique » du conflit au Yémen.


« J’ai le fervent espoir qu’à ce sommet de la Ligue arabe, les dirigeants vont définir des lignes directrices claires pour résoudre de manière pacifique la crise au Yémen », a affirmé le 8ème secrétaire général de l’ONU au sommet de la Ligue des Etats arabes à Sharm el-Sheikh, en Egypte.


Des ONG arabes demandent l’ONU d’œuvrer pour une résolution pacifique à la crise yéménite


Le même jour, un collectif composé de 34 ONG arabes appartenant au Yémen, Tunisie, Maroc, Irak, Liban, Palestine, Syrie, Oman, Jordanie et Egypte, ont dénoncé l’intervention militaire de la coalition arabe au Yémen et ont demandé à l’ONU de faire le nécessaire afin de trouver une solution pacifique à la crise yéménite.


« Ce qui se passe au Yémen vise à couper la route au droit du peuple yéménite à résoudre ses problèmes par le dialogue pacifique tout en rejetant les commandements qui lui sont dictés par l’Arabie Saoudite et certains pays du Golfe et qui ne rendent pas service aux intérêts du Yémen et de son peuple yéménite », ont affirmé les 34 ONG dans un communiqué.


Au Maroc, l’Association Marocaine des Droits Humains (AMDH) a condamné « fermement l’intervention militaire au Yémen » et a appelé au « respect du droit du peuple yéménite à l’autodétermination ».


Dans un communiqué publié jeudi 26 mars, l’AMDH a exprimé son « rejet total de toute intervention militaire dans la région et toute exploitation de la situation au Yémen pour servir les agendas des dictatures arabes et les forces impérialistes de l’Occident ».


L’ONG marocaine a accusé ces dictatures arabes et ces forces impérialistes occidentales d’avoir manœuvré pour « avorter le printemps arabe et enterrer les aspirations des peuples de la région » à la liberté et la démocratie.


Dans son communiqué, elle a réitéré sa demande de « trouver une solution pacifique » à la crise yéménite qui conviendrait à toutes les parties et a demandé à la communauté internationale « d’endosser son entière responsabilité afin de protéger le peuple du Yémen et de garantir son droit à l’autodétermination ».


Son dernier appel était adressé à l’ensemble des forces démocratiques et de défense des droits humains. Elle les a appelé à « être solidaires, unis et fermes pour faire face aux plans de ces forces hostiles à la démocratie et au respect des droits de l’Homme et des droits des peuples ».


Vendredi 27 mars, c’était le tour du « Réseau démocratique marocain de solidarité avec les peuples » d’exprimer sa condamnation de l’opération « Tempête décisive » lancée par des pays arabes contre les milices Houthis au Yémen.


Bien avant le lancement des raides de la coalition arabe au Yémen, le Collectif associatif marocain, composé de dizaines d’associations des droits humains et des libertés publiques, syndicats, alliances et réseaux associatifs a appelé les autorités marocaines à « œuvrer pour aider les différentes parties yéménites à trouver une solution pacifique à la crise au Yémen, mutuellement acceptable et sous supervision onusienne ».


Des manifestations en Arabie Saoudite pour l’arrêt immédiat de l’agression armée


Loin des ONG, en Arabie Saoudite, les habitants de Qatif et d’Al-Ahssa ont manifesté pour dénoncer l’intervention militaire de la coalition arabe au Yémen. Les manifestants, qui se sont réunis dans la nuit de dimanche à lundi dans les rues de Qatif et d’Al-Ahssa, ont demandé au gouvernement saoudien l’arrêt immédiat de cette agression armée.


La participation marocaine est une violation de la Constitution et du principe de la Choura


Au Maroc, le penseur musulman Kamal Znidar a critiqué la participation marocaine dans la guerre contre les Houthis en mettant l’accent sur le non-respect du principe islamique de la Choura.


« Normalement, ce genre d’engagement militaire ne doit pas être décidé sans le consentement du peuple. Le Coran ordonne l’émir des croyants de consulter son peuple avant de prendre ce genre de décision. Malheureusement, cet ordre divin ne s’observe plus depuis des siècles », a déploré l’auteur du livre « Islam : meilleure religion au monde ».


Selon lui, « Les marocains n’étaient pas d’accords avec la rupture des relations diplomatiques marocaines avec l’Iran en 2009. Ils étaient loin d’être honorés de voir leur pays se soumettre aux ordres des Al Saoud. Et c’est fort probable qu’ils soient aujourd’hui majoritairement contre la déclaration de guerre aux Houthis qui se sont emparés du pouvoir au Yémen ».


« Les Marocains sont un peuple hostile au wahhabisme et aux politiques interne et externe de l’Arabie Saoudite. Les rois saoudiens sont des traitres aux yeux des marocains. Par contre, les dirigeants iraniens et leurs alliés qu’ils soient syriens, libanais ou yéménites sont perçus comme des héros. En tant que marocains, nous préférons que le Yémen et aussi la Syrie soient gouvernés par des chiites antisionistes et anti-impérialistes que par des traitres, marionnettes de l’entité sioniste et des superpuissances occidentales », a-t-il ajouté.


Dans le même registre, le journaliste Ali Lmrabet, dans un article intitulé « Le roi déclare la guerre aux houthistes sans passer par le gouvernement et le parlement », a de son coté mis l’accent sur le non-respect de la Constitution marocaine. Selon lui, cette participation militaire du Maroc au Yémen viole les articles 49 et 99 de la Constitution.


L’article 49 indique que « le Conseil des ministres délibère de la déclaration de guerre » tandis que l’article 99 indique que « cette déclaration doit être faite après communication faite par le roi au parlement ».
 




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Salma Boughanbour
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