AFRIQUE

Economie verte, coeur de la transformation structurelle de l'Afrique


Alwihda Info | Par - 28 Avril 2013


Réécouter l’interview de Thierry Téné dans le magazine Afrique Invest de Marco Wolter sur Radio Méditerranée Internationale, la Radio du Grand Maghreb.


Pour la très dynamique Aïssata Coulibaly Touré, Présidente de l’Association des femmes chefs d’entreprises du Mali, Présidente du Réseau des Femmes Opératrices Economiques du Mali et Vice-Présidente du Conseil National du Patronat du Mali, « quand les femmes promettent, elles le font ». Et comme elles sont désormais engagées dans l’économie verte et le green business en Afrique, on peut avoir l’espoir que ce secteur sera au cœur de la transformation structurelle de l’Afrique.

Pour la transformation structurelle de l’Algérie, il faudra désormais compter avec le Réseau Algérien des Femmes en Economie Verte (RAFEV) qui organisait encore récemment une rencontre sur cette thématique. Le RAFEV, qui souhaite encourager l’engagement des algériennes dans l’économie verte, a la particularité d’avoir été créé après la publication d’une étude, financée par la coopération allemande au développement (GIZ), qui conclut que l’économie verte pourrait générer, en Algérie, un peu plus de 1,4 million d’emplois à l’horizon 2025.



Pour le Bureau International du Travail (BIT), l’horizon est au verdissement des emplois y compris en Afrique et particulièrement pour les femmes. Nous avons eu l’immense privilège de collaborer avec le BIT pour l’organisation, en 2011 au Burkina Faso, du forum des employeurs africains sur le thème « L’économie verte et l’entreprenariat féminin, nouveaux moteurs de la croissance économique et de la création d’emplois en Afrique de l’Ouest » avec la participation de plusieurs organisations patronales d’Afrique Centrale et de l’Ouest. La déclaration finale de cette rencontre a particulièrement insisté sur le rôle des organisations patronales et des réseaux d’employeurs pour le déploiement de l’économie verte en Afrique.



Pour le déploiement de l’économie verte au Maroc, la Confédération Générale des Entreprises Marocaines (CGEM) est un acteur incontournable et indispensable. Elle a créé une commission particulièrement dédiée à ce secteur d’activités. La délégation de la CGEM de Fès vient d’organiser une rencontre sur le potentiel d’économie verte dans cette région. En mettant la croissance verte au cœur de sa stratégie nationale et dans ses délégations régionales, la CGEM va ainsi peser sur la transformation structurelle du Maroc. Présidents et cadres des patronats, prenez deux minutes et quatre secondes de votre précieux temps pour visionner les enjeux de l’économie verte à partir des bonnes lunettes de Saïd Mouline, Président de la Commission Economie Verte de la CGEM. Pour avoir eu la chance de participer à une conférence avec lui l’année dernière à Marrakech, nous recommandons de le rencontrer. C’est le cœur de notre message à destination des organisations patronales africaines dans le cadre de la transformation structurelle de l’Afrique.



Pour la Banque Africaine de Développement (BAD) « Le cœur du message est que l’Afrique doit accélérer sa transformation structurelle en dopant le potentiel de sa jeunesse, en investissant dans la science, les technologies et l’innovation, en accélérant le rythme de l’intégration économique, en passant à une économie verte, en soutenant les entreprises du secteur privé. » Telle est l’une des principales recommandations de son rapport annuel 2012 qui sera présenté du 27 au 31 mai à Marrakech lors de son Assemblée Générale. Au cours de cette rencontre la BAD va plaider avec force pour la transformation structurelle de l’Afrique. Les délégués reviendront du Maroc avec la recette pour accompagner leurs pays sur la voie de l’économie verte.



Pour que l’économie verte soit la voie du développement durable de l’Afrique, il va encore falloir y donner de la voix pour sensibiliser et convaincre les africains. En effet, certains décideurs et chefs d’entreprises africains voient rouge quand on parle d’économie verte pas parce qu’ils sont devenus daltoniens mais parce qu’ils n’ont pas les bonnes lunettes.



Pour avoir les bonnes lunettes et voir un peu plus clair, l’OCDE a organisé en avril à Paris la réunion de son Comité d’Aide au Développement (CAD) au niveau des hauts fonctionnaires sur le thème de la croissance verte. Plusieurs cadres et responsables des administrations et ministères africains ont pris part à ces travaux. Espérons qu’ils ont été sages et ont retenu le cœur du message du document de réflexion intitulé Placer la croissance verte au cœur du développement . C’est le suivant « Les Gouvernements qui mettent la croissance verte au cœur de leur développement peuvent assurer une croissance économique durable, une stabilité sociale, la protection de l’environnement et la préservation des ressources pour le futur ». Le futur en Afrique se construit maintenant où nous devons anticiper le long terme tout en répondant aux urgences du court terme. L’OCDE affirme d’ailleurs que « la croissance verte n’est pas un luxe. C’est le seul moyen d’atteindre un développement durable et de lutter contre la pauvreté à l’échelle mondiale sur le long terme ». Mais comment y arriver ?



Pour y arriver, nous devons avoir une bonne démarche prospective indispensable à l’anticipation des risques et une meilleure planification des actions sous la coordination du sommet de l’Etat. Idéalement la Primature.



Pour l’Ethiopie, c’est sous la coordination de la Primature que le pays a défini en 2011 sa stratégie pour une économie verte et résistante au climat avec des portes feuilles d’investissements. L’objectif est d’ « accroître le PIB par habitant de 475 % entre 2011 et 2030 de manière à ce que le pays ne fasse plus partie des pays les moins avancés mais se hisse au rang de pays à revenu moyen, et ce, en réduisant ses émissions de gaz à effet de serre de 35 %. »



Pour le Maroc et l’Ile Maurice, c’est le fort pourcentage d’importation des combustibles qui a servi de catalyseur pour les grandes ambitions politiques de green business. Quand le baril du pétrole a atteint le record de 147 dollars en 2008, la facture des produits pétroliers est passée au rouge poussant les autorités à passer au vert. La même année, la flambée de la facture des produits de première nécessité à créer des fractures dans plusieurs pays africains qui ont connu des émeutes de la faim. La fin de la flambée des cours du pétrole n’est pas pour demain et ce n’est probablement pas la fin des émeutes de la faim en Afrique.



Pour l’Afrique qui possède 60 % des terres arables mondiales non utilisées, il est anormal que les gens ne mangent pas à leur faim par manque de nourriture. L’agriculture est probable l’une des immenses opportunités en Afrique. Mais avec les lunettes de l’économie verte, nous sommes obligés de passer par la double révolution verte. Une évolution des mentalités positionnerait le green business comme l’ADN de l’agriculture et de la révolution verte en Afrique. Dans la pratique, il faut passer de « l’agriculture de grand-mère » à une agriculture intensive mais écologiquement efficace et économiquement rentable. A table, combien sommes-nous à envisager que les déchets alimentaires et verts en général sont un gisement de production d’engrais et d’énergie ?



Pour l’énergie justement, si on met les bonnes lunettes, on verra la lumière et grâce à l’économie verte, on se posera les bonnes questions. Avant de penser à la production, quelles sont les actions pour réduire la consommation ? Combien pouvons-nous économiser grâce à l’efficacité énergétique et aux produits à faible intensité énergétique ? En anticipant sur la flambée des cours du pétrole et l’augmentation de la demande en énergie, n’est-il pas plus logique et même stratégique d’accroître considérable le pourcentage des énergies renouvelables dans le mix énergétique ? Il s’agit de répondre aux besoins immédiats tout en projetant l’Afrique dans le futur.



Pour que l’Afrique soit le laboratoire des économies du futur, nous devons envisager toutes les idées neuves et les innovations technologiques pour lutter contre les coupures d’électricité. Avec les nombreuses coupures d’électricité, le business des lampes solaires est entrain d’exploser en Afrique. Certains africains qui naissent aujourd’hui dans les zones rurales non éclairées ne connaitront jamais les bougies et les lampes à pétrole mais directement les derniers produits solaires issus de l’innovation technologique.



Pour les déchets, la même logique est envisageable. Est ce que ces détritus qui sont la source de nos problèmes ne sont finalement pas LA solution si on cesse de les considérer comme des ORDURES mais plutôt comme de l’ « OR DURE » et dont une nouvelle matière première ? Tel était le cœur de notre message dans l’analyse Africains, la solution au développement durable est dans nos poubelles .



Pour le développement durable de l’Algérie, il faudra aussi miser sur la filière recyclage dont le Chiffre d’Affaires est estimé à 23 milliards de DA soit 230 millions d’euros. Il s’agit uniquement de la valorisation des 6,1 millions de tonnes des déchets ménagers dont seulement 5 % sont actuellement recyclés. Si on rajoute les déchets industriels et hospitaliers, on peut imaginer l’immense potentiel d’investissement et de création d’emplois verts. L’ensemble des pays africains sont dans une situation similaire. La compréhension des atouts de la croissance verte en Afrique passe par une corrélation entre la croissance économique et la consommation des ressources.



Pour les ressources humaines qui souhaitent amorcer une réflexion sur la corrélation entre croissance économique et gestion durable des ressources, l’enjeu est d’envisager le découplage entre consommation des matières premières et fabrication des biens et services. En saisissant les lianes de l’économie verte, nous pouvons effectuer cette liaison entre l’urgence de la triple réduction (réduction de la consommation d’énergie, réduction des pollutions et réduction du prélèvement des ressources naturelles) et la nécessité du développement durable inclusif.



Pour que le développement de l’Afrique soit durable et inclusif, il faudra une forte participation des femmes et des jeunes grâce à la libération de leurs potentiels. C’est probablement l’une des solutions à la résolution de la difficile équation de l’atténuation des conséquences des chocs causés par la triple tension démographique, sociale et environnementale. Nous devons donc mettre l’économie verte au cœur de la transformation structurelle de l’Afrique. En Afrique, quand les femmes promettent, elles le font. Y compris pour l’économie verte ? A Ouagadougou, elles l’ont promis la main sur le cœur. On compte donc sur les femmes pour que les africains chantent la musique de l’économie verte en chœur.



Thierry Téné, Directeur et co-fondateur de l’Institut Afrique RSE



Nos prochaines interventions à l’international :

· 8 mai, Douala, intervention sur le thème « Qualité de la relation donneur d’ordre / sous-traitant : Bonnes pratiques à promouvoir : RSE dans la sous-traitance » pendant les Journées Nationales de la PME organisées par le Ministère des PME, de l’économie sociale et de l’artisanat

· 10 mai, Douala, intervention sur la Responsabilité Sociétale des Entreprises et l’économie verte en Afrique après des élèves-ingénieurs de l’Institut Supérieur de Technologie d’Afrique Centrale

· 13 juin, Bruxelles,intervention à la conférence « Panafricanisme et renaissance africaine : exigences stratégiques pour relever les défis du développement économique et de l’intégration ? » organisée par le Groupe Africain des Ambassadeurs et la Mission Permanente de l’Union Africaine à Bruxelles

· 18 juin, Douala,intervention sur l’état des lieux du développement durable au Cameroun lors des journées du développement durable

· 27 juin, Paris, Intervention sur le thème « RSE en Afrique : opportunités pour les entreprises » auprès des cadres et dirigeants d’entreprises membres du think tank Les Nouveaux Cercles

· 27 et 28 novembre, Accra,troisième édition du forum international des pionniers de la Responsabilité Sociétale des Entreprises en Afrique organisée par the Ghana Employers’Association , principale organisation patronale, et l’Institut Afrique RSE



Dans la même rubrique :