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COMMUNIQUE

Tchad : Les bourses de l'infortune


- 9 Mai 2014


Dans un communiqué parvenu à Alwihda Info, le M3F énumère cinq idées pour résoudre définitivement le problème des bourses des étudiants tchadiens.


« Celui qui est maître de l'éducation peut changer la face du monde » soutenait Leibniz, philosophe allemand et contemporain de Voltaire. Avec 33 % de taux d'alphabétisation, inutile de dire que le Tchad n'est pas prêt de changer la face du monde, ni même d'atteindre l'objectif chimérique que lui a fixé Deby d'être un pays émergent à l'horizon 2025. A cette assertion, certains rétorqueront que les taux d'alphabétisation des autres pays de la bande sahélienne ne sont pas meilleurs. Certes, mais ceux-ci ne disposent des revenus faramineux que tire chaque année le Tchad de ses champs pétrolifères. En dix ans, le pétrole tchadien a ainsi rapporté 7,5 milliards de dollars, une manne qui n'est visiblement pas arrivé jusqu'au secteur de l'éducation. Entre 2011 et 2012, la dotation accordée au Ministère de l'Education primaire et de l'éducation civique a baissé de près de 10 %, se fixant à seulement 170 millions d'euros.
 
On serait alors en droit de penser que, comme au Cameroun, le Tchad bénéficie d'un secteur de l'enseignement supérieur dynamique... Que nenni ! Car, outre le délabrement patent de l'université de Ndjamena, le gouvernement n'a jamais été capable de mettre sur pied un système de bourses décent pour les étudiants tchadiens qui, ne pouvant compter sur un enseignement de qualité dans leur pays natal, se voient obliger de s'exiler. D'autres pays d'Afrique Centrale y sont pourtant arrivés. Le Gabon, par exemple, a créé depuis plusieurs années maintenant l'Agence nationale des bourses du Gabon et verse 3049 euros par an à ses ressortissants étudiants à l'étranger.
 
Mais, indubitablement, l'Etat tchadien se plaît à recevoir des bonnets d'âne. L'embryon de système de bourses qu'il a mis en place s'apparente plus à une insondable farce qu'à une véritable politique d'aide vis-à-vis de la jeunesse. Automatiquement réservées aux étudiants dont les parents ont des accointances avec le pouvoir, ces bourses (qui ne sont d'ailleurs que de faméliques indemnités forfaitaires versées une fois l'an) sont accordées au compte-gouttes en fonction de critères purement politiques. Aucune chance d'en bénéficier si vous êtes fils/fille de quidam ou pire, d'opposant à Idriss Deby, quand bien même vous auriez le même quotient intellectuel qu'Einstein. 
 
Devant cette énième illustration du népotisme régnant au pays de Toumaï, les étudiants tchadiens scolarisés à l'étranger se révoltent. En Russie, au Burkina-Faso et plus récemment en Algérie. Manifestant pacifiquement devant les ambassades du Tchad, ils réclament plus de justice sociale par la revalorisation des modestes indemnités forfaitaires auxquels ils ont droit. Malgré les menaces proférés par la police politique du régime à l'endroit de ces étudiants frondeurs, ces derniers ne sauraient céder, excédés par la dilapidation des deniers de l'Etat au profit d'une infime minorité. De toute façon, le gouvernement n'a aucune intention de trouver une solution globale à ce problème, se contentant d'intimider ou de tenter d'acheter le silence de ceux qui se sont révoltés et priant pour que le reste des étudiants n'en arrive pas au même geste salutaire. 
 
L'économiste Robert E. Lucas faisait en 1986 du capital humain, en somme l'éducation de la population, comme une des sources principales de la croissance endogène. Force est de constater que ni au niveau de l'enseignement primaire et secondaire, ni au niveau de l'enseignement supérieur, le régime d'Idriss Deby ne donne les moyens au Tchad de se doter d'un capital humain à même de faire décoller son économie.
 
En conséquence, le Mouvement du 3 février apporte son soutien plein et entier aux courageux étudiants tchadiens qui manifestent devant leur ambassade d'Alger et à tous ceux qui, à l'avenir, se lèveront pour dire non à ce système de bourses inique. Véritable force de proposition, notre mouvement développe ici quelques idées pour mettre sur pied une véritable politique à l'endroit des étudiants tchadiens scolarisés à l'étranger :
 
1. Créer l'Agence nationale des bourses (ANB), organe sous la tutelle du Ministère de l'enseignement supérieur exclusivement chargé de la question ; la doter d'un budget propre, revu à la hausse chaque année. Les bourses seront désormais versées mensuellement. Par ailleurs, le montant des bourses sera modulé en fonction du coût de la vie dans le pays d'accueil.
 
2. Procéder à un recensement précis des étudiants tchadiens actuellement à l'étranger avec l'aide des chancelleries, afin de ne laisser aucun étudiant en déshérence.
 
3. Conditionner l'octroi de la bourse à la réussite des études supérieures. Cette bourse sera automatiquement annulée en cas de deux redoublement successifs, ou en cas de poursuite des études au-delà de l'âge de 30 ans. 
 
4. Accorder une bourse plus élevée de 50 % aux récipiendaires de la mention « très bien » (25 % dans le cas d'une mention « bien ») au baccalauréat tchadien et les accompagner dans leurs démarches d'inscription dans une université d'étrangère ou encore dans celles d'obtention du visa. Pour le reste, sélectionner les boursiers appelés à partir à l'étranger exclusivement sur des critères scolaires (dossier scolaire, résultats du baccalauréat et entretien de motivation). 
 
5. A moyen terme, avec le développement du secteur formel, instaurer un plafond calculé sur le revenu des deux parents au-delà duquel le montant de la bourse accordée à l'étudiant sera divisé par deux.
 
Le M3F compte, une fois le changement réalisé, mettre en oeuvre toutes ces réformes pour que la jeunesse du Tchad, après avoir subi durant toutes ces années l'indifférence des pouvoirs publics, devienne une des fiertés du continent africain et puisse enfin changer la face du monde.
 
Fait à Paris (Javel) le 8 mai 2014,
Collectif

Tchad : Les bourses de l'infortune



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