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TCHAD

Tchad : un rapport pointe les faiblesses de l'armée et suggère des réformes


Alwihda Info | Par Info Alwihda - 25 Janvier 2021


International Crisis Group a publié le 22 janvier un rapport sur les défis de l'armée tchadienne. Il en ressort que malgré des avancées démocratiques en 30 ans, le pouvoir n'a pas ouvert l'espace politique, ni réussi à insuffler une dynamique de développement économique, ni à créer des institutions solides, à commencer par l'armée.


Dans son rapport, Crisis Group relève que l’armée tchadienne, souvent sollicitée par ses voisins et les partenaires occidentaux, est une pièce maitresse du dispositif contre le terrorisme au Sahel. Toutefois, "sa cohésion générale est faible, les tensions communautaires et les problèmes d’indiscipline y sont récurrents et, plus récemment, de nouvelles dissensions ont émergé en son sein".

"Le Tchad va traverser une période d’incertitude, avec à court terme une élection présidentielle organisée en 2021 dans un climat social tendu et, à moyen ou long terme, des risques de succession violente si le président devait quitter le pouvoir", met en garde le rapport. Les autorités sont appelées à rendre l’armée plus représentative et plus professionnelle, répondre aux mécontentements qui s’expriment et permettre un débat public sur le futur de l’armée nationale. Enfin, des garde-fous doivent être soutenus par les partenaires du Tchad pour décourager d’éventuelles violences en cas de vacance du pouvoir.

D'après Crisis Group, la restructuration de l'armée annoncée en 2011 se révèle être une illusion :
"L’armée concentre en elle-même tous les enjeux de pouvoir. Pour Déby, la réformer en profondeur serait prendre le risque de provoquer des disruptions, de redonner du poids à des communautés perçues comme hostiles au pouvoir, et surtout de fragiliser ses soutiens et sa base. Ce serait mettre en péril la survie d’un régime qui tient surtout par le contrôle de l’armée."
Le rapport évoque une fluctuation de la gestion de l'armée au cours des 30 dernières années :
"Depuis plusieurs années, le président semble faire plus de place à sa famille proche et aux combattants de la première heure dans son entourage militaire et accorder moins facilement sa confiance aux cadres militaires et officiers les mieux formés."

Crisis Group décrypte le fonctionnement du système en place au Tchad et met en avant un "recentrage familial", ainsi qu'une vigilance suite à des trahisons :
"Le système en place reposait alors sur une forte militarisation de l’appareil d’Etat et un renouvellement régulier des responsables de l’administration afin que l’assise politique du chef de l’Etat ne soit jamais contestée."

"Petit à petit, les membres de la famille du président se sont installés aux postes clés de l’appareil sécuritaire, tendance qui s’accentue ces dernières années."

"Au cours de ses 30 années au pouvoir, Idriss Déby a connu de nombreuses trahisons et dissidences émanant de son entourage, ce qui l’a conduit à être plus méfiant vis-à-vis des cadres militaires".

Malgré des pressions diverses, la centralisation du pouvoir se renforcer. Le président joue un rôle d'arbitre entre des parties en conflit plutôt que celui d'un personnage capable d'imposer une discipline :
"Si, par le passé, Déby était décrit comme un président à l’écoute de ses collaborateurs, il est aujourd’hui plus souvent dépeint comme un homme seul qui accorde moins facilement sa confiance et qui centralise les décisions.

Cette centralisation ne signifie pas que le président puisse décider en toute liberté. Bien souvent, le président joue un rôle d’arbitre entre des forces contra- dictoires plutôt que celui d’un chef capable d’imposer une discipline."

Crisis Group précise que son rapport vise à comprendre certaines de ses fragilités internes et propose des recommandations pour limiter les risques que celles-ci deviennent un facteur de troubles. Malgré des avancées démocratiques en 30 ans, le pouvoir n'a pas ouvert l'espace politique, ni réussi à insuffler une dynamique de développement économique, ni à créer des institutions solides, à commencer par l'armée :
"Des décennies de mauvaise gouvernance et d’utilisation abusive ont fait de l’armée une source d’instabilité politique au Tchad. Dans un avenir proche, elle pourrait de nouveau constituer un facteur de troubles. Il est temps que les Tchadiens et les partenaires du Tchad se saisissent de ce sujet avant qu’il ne s’impose de lui-même".

Crisis Group préconise de réduire les risques de succession violente, lutter contre les abus des forces de sécurité et renouer des liens plus sains avec la population, mettre en place une armée plus représentative et plus professionnelle, et débattre de la question de l'armée.

L’armée tchadienne, qui comprend, selon les estimations, entre 40 000 et 65 000 soldats, jouit depuis près d’une décennie d’une bonne réputation à l’extérieur de son territoire, selon le rapport. Il s’appuie sur une quarantaine d’entretiens réalisés en 2020 à N’Djamena et à Abéché avec des militaires tchadiens dont certains ont servi à l’étranger, notamment au Mali et au Nigéria. Crisis Group a également pu s’entretenir avec des experts en matière de défense, des chercheurs, des personnalités politiques tchadiennes, des représentants d’organisations de la société civile et des partenaires internationaux du pays.



Pour toute information, contactez-nous au : +(235) 99267667 ; 62883277 ; 66267667 (Bureau N'Djamena)