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ANALYSE

Tchad – Crise agropastorale dans le Sud : Baba Ladé, le médiateur que tout le monde écoute


Alwihda Info | Par Alwihda - 30 Juin 2025


NDJAMENA – À mesure que les violences entre éleveurs et agriculteurs ravagent de nouveau les régions du Sud, un nom revient dans les débats et les murmures : Baba Ladé. Ancien chef rebelle devenu Directeur général adjoint (DGA) de la police nationale, Mahamat Abdelkader Oumar est aujourd’hui l’une des rares figures capables de parler aux deux camps. Mieux encore, il est écouté.


Contrôleur général Mahamat Abdelkader Oumar, directeur général adjoint de la Police nationale.
Contrôleur général Mahamat Abdelkader Oumar, directeur général adjoint de la Police nationale.
Dans les zones déchirées par les conflits agropastoraux – du Mandoul aux deux Logones, en passant par le Mayo-Kebbi et le Moyen-Chari – rares sont ceux qui possèdent une légitimité véritable, enracinée dans le vécu quotidien des populations. Baba Ladé en fait partie. Mbororo de naissance, il est lui-même fils d’éleveur, mais a passé des années de lutte armée à vivre parmi les cultivateurs. Il a partagé leurs nuits, leurs repas, leurs peurs. Résultat : aujourd’hui, aussi bien les pasteurs que les agriculteurs lui reconnaissent une autorité naturelle et un langage commun.

Ce respect n’est pas né de discours ou de fonctions administratives. Il vient d’une proximité authentique et d’une connaissance intime des souffrances de chaque camp. Là où les émissaires officiels peinent à instaurer un dialogue, Baba Ladé peut s’asseoir dans un campement peul ou un village agricole, et être entendu. Sa parole porte. Non pas parce qu’il est un symbole d’État, mais parce qu’il est l’un des leurs.

Face à l’incapacité manifeste des autorités locales à contenir les tensions – comme l’a tragiquement illustré le drame de Mandakao – certains observateurs plaident pour qu’on donne à Baba Ladé une mission de médiation officielle. Ce serait là non seulement un choix stratégique, mais aussi un geste de lucidité. Car à défaut de consensus politique, il reste la réalité du terrain : seuls les hommes enracinés dans ces réalités peuvent en dénouer les fils.

Baba Ladé incarne ce rare trait d’union. Ni totalement du côté des éleveurs, ni totalement du côté des agriculteurs, mais au milieu, à équidistance, fort d’un passé commun et d’un langage que chacun comprend. Sa capacité à désamorcer les tensions n’est plus à démontrer. D’ailleurs, selon plusieurs sources locales, il aurait déjà contribué, dans l’ombre, à éviter plusieurs affrontements ces derniers mois.

Ses propositions d’actions concrètes, comme les patrouilles de sécurité, se heurtent parfois à des blocages hiérarchiques. Pourtant, sur le terrain, beaucoup espèrent qu’il soit pleinement mandaté pour jouer ce rôle de médiateur et de pacificateur. Car il est peut-être, dans l’état actuel des choses, le seul capable de ramener les protagonistes autour d’une même table, sans que cela ne tourne à l’affrontement.

Oui, son passé dérange. Oui, son parcours est controversé. Mais dans une crise où les morts s’accumulent et où les villages se vident, peut-on encore se permettre de bouder l’efficacité ? Peut-on continuer à confier la médiation à ceux dont la voix ne porte pas, pendant que celui qui peut apaiser les rancœurs reste à l’écart ?
Et si, cette fois-ci, on faisait le pari de la réalité plutôt que celui des apparences ?
Et si Baba Ladé, ancien rebelle au turban poussiéreux, devenait enfin l’artisan de la paix que réclame le Sud ?



Pour toute information, contactez-nous au : +(235) 99267667 ; 62883277 ; 66267667 (Bureau N'Djamena)