Ahmat Yacoub a soutenu en France une thèse de doctorat en sociologie sur la gestion des conflits à travers la médiation. Il vient de publier un ouvrage d’environ 500 pages sur la thématique en question. Après la suppression de la Médiature de la République en 2018, l’ancien conseiller chargé de missions de l’institution a créé un centre d’études sur la prévention de l’extrémisme. Il est très sollicité, un peu partout dans le monde, pour intervenir dans des conférences sur le sujet.
Depuis la disparition de l’institution, il s’est refusé à commenter publiquement la décision du 1er Forum national inclusif mais à l’heure où un 2ème Forum se prépare, et où, à l'issue des pré-forums décentralisés, la plupart des provinces appellent à la réhabilitation de la Médiature, Ahmat Yacoub a accepté de se confier à nous.
Alwihda Info : N’êtes-vous pas déçu de la suppression de la Médiature de la République au Tchad en 2018 ? Quelles sont, d’après vous, les raisons de sa suppression ?
Ahmat Yacoub : Vous savez que la suppression de la Médiature se justifie par le fait que beaucoup ne comprennent pas le rôle exact de l’institution. Ils croient qu’elle est limitée à la gestion des conflits opposant l’État aux mouvements politico-militaires et il est déplorable qu’on trouve jusqu’à des hautes personnalités comme de ministres et de députés qui sont bloqués sur cette définition. Or, la Médiature est un des mécanismes de protection non juridictionnelle des droits fondamentaux de la personne. C’est un mécanisme de gestion des conflits développé et modernisé, avec pour mission principale de corriger et de prévenir les injustices causées aux citoyens par une autorité administrative publique. Créé pour la première fois par les suédois en 1809, l’Ombudsman a pour rôle de servir d’intermédiaire entre l’administration et les administrés et depuis, elle a évolué pour être dans certains pays démocratiques soit une AAI « Autorité Administrative Indépendante » à l’image de la France ou AAIS (Administration Administrative Indépendante spéciale) comme en Espagne et au Portugal.
Pouvez-vous nous expliquer en quoi les AAI et AAIS représentent une évolution de l’institution ?
Ahmat Yacoub : De réformes en réformes, des pays comme l’Espagne, le Portugal puis la France, ont adopté une stratégie qui a consisté à fusionner plusieurs Autorités Administratives Institutionnelles (AAI) pour en faire une importante Autorité Administrative Indépendante Spécialisée (AAIS) dont l’objet principal, justifient-ils, le renforcement de l’institution dans le domaine de l’hybridité et de l’indépendance aux pouvoirs. Et c’est au moment où le Monde adapte et adopte ce mécanisme efficace de gestion des conflits, le destin a voulu que la Médiature tchadienne soit supprimée en mars 2018.
Pourquoi n’avez-vous pas défendu l’institution avant et lors du Forum ?
Ahmat Yacoub : Écoutez, c’est très compliqué puisque la décision était déjà prise sur la base d’un acharnement gratuit contre l’institution et j’ai compris qu’il n’y a rien à faire. Le Médiateur s’est déployé pour la défendre et je lui ai dit clairement dès le départ que c’est une peine perdue. Nous avons été début mars 2018 en mission à Abeché où nous avons réussi à gérer un conflit meurtrier opposant Arabes et Ouaddaiens et avons par la suite crée une commission de suivi. Mais deux semaines après, l’institution a été supprimée. Il était sage de la réformer et nous avons présenté un projet de réforme qui n’a même pas été consulté.
Pouvez-vous nous dire en quelques mots ce que l’institution tchadienne a pu faire en 20 ans d’existence ?
Ahmat Yacoub : Selon une étude statistique que j’ai moi-même effectuée en 2017, 65% de ses activités entre 2000 et 2010 étaient consacrées au conflit politico-militaire, et ce dans le seul but de contribuer à ramener la paix sociale dans un pays déchiré par quatre décennies de guerre fratricide avec des interférences étrangères.
C’est l’occasion de le souligner que 15 000 combattants ont regagné la légalité. 35% des conflits gérés étaient des dossiers qui échappent aux voies normales. On note qu'il n’y a pas que les conflits d’ordre classique opposant administrés et administration que la Médiation tchadienne a eu à faire mais il y a de conflits inter/intracommunautaires, de chefferie, fonciers ou agriculteurs/éleveurs, etc. Dans nos actions, nous avons traité de conflits opposant de hautes personnalités comme de ministres à de simples citoyens. Dans beaucoup de pays comme en Ouganda, en Afrique du Sud, au Burundi, l’Institution est modernisée. En plus de son rôle régalien, elle devient un mécanisme de lutte contre la corruption. Au Tchad, si elle est réformée, elle serait un mécanisme important de lutte contre la corruption pour appuyer la politique du Chef de l’État entreprise contre la corruption et le détournement.
À un moment où les langues se délient sur la réhabilitation de la Médiature, croyez-vous que ce soit nécessaire ?
Ahmat Yacoub : En effet, tous les pays démocrates sont unanimes sur le fait que la médiation est un mécanisme essentiel qui apportera des éléments positifs à la gestion des conflits. Elle contribue à éloigner les conflits en proposant des solutions négociées et consensuelles aux parties en conflit. Toutefois, l’efficacité de l’institution dépend avant tout de son adaptation aux valeurs socioculturelles du temps et de l’espace. Qu’il s’agisse des conflits impliquant administration et administré(s), inter ou intracommunautaire, ce sont après tout, des conflits de sociétés. Mais la réhabiliter au Tchad telle quelle était n’est pas nécessaire car il faut une institution forte qui respecte les conditions de son éligibilité dans les sphères internationales.
Ça veut dire quoi ? pouvez-vous expliquer ?
Ahmat Yacoub : L’institution telle qu’elle était s’est privée de beaucoup d’avantages. D’abord son éligibilité aux formations, aux assistances et aux aides a toujours été remise en cause par les instances internationales des ombudsmans. Elle n’a jamais exercé le droit de vote aux assemblées ordinaires ou extraordinaires des membres ou participer aux instances administratives et décisionnelles des associations internationales des Médiateurs. En sommes, notre Médiature n’a jamais été reconnue par les organes internationaux de l’Ombudsman comme l’AOMF, l’AOM, l’UEMOA, l’AMP. Même invités dans de conférences, nous ne sommes pas autorisés à siéger dans des assemblées et interdits de vote puisque notre institution ne répondait pas aux normes. C’était ça la réalité.
Quelles sont ces normes d’après-vous ?
Ahmat Yacoub : Pas d’après moi mais selon les instances internationales, Il y a, au moins trois exigences essentielles à respecter : 1/ le médiateur doit être nommé/ élu ou désigné par le Parlement même si il peut être consenti par le chef de l’État comme le cas de la France ; 2/ son mandat doit être défini 3/ il doit désigner son staff sur la base d’un dossier c’est-à-dire il a le libre choix de ses collaborateurs et la possibilité de leur déléguer des responsabilités administratives et des charges d’enquêtes. Et je ne crois pas que cela est possible pour l’instant.
Vous voulez dire qu’il faut copier sur la France comme nous avons l’habitude de le faire en Afrique francophone ?
Ahmat Yacoub : Pas du tout. Je n’ai pas dit cela car en tant qu’expert en la matière, je dirai que la Médiature en France qui est déjà réformée en Défenseur des Droits n’est pas un bon exemple à prendre. En 2016, au Canada, lors d’une conférence, je n’ai pas manqué d’attirer l’attention du Médiateur français sur ce que je pense. Il y a des pays exemplaires en Afrique comme le Burundi, l’Afrique du Sud, le Burkina, l’Ouganda, et en Europe les pays Scandinaves. En Amérique c’est le Canada. Les pays les plus évolués sont l’Espagne et le Portugal qui ont créé une AAIS, un tout en un, regroupant plusieurs AAI. En France, il y a une quarantaine de AAI alors qu’au Tchad, il n’y a que deux seulement.
Si les gens ignorent le rôle exact de l’institution, ne croyez-vous pas que vous avez failli à votre mission de communiquer ?
Ahmat Yacoub : Exact, nous avons une part de responsabilité et avons échoué dans la communication puisque nous ne disposons ni d’un site, ni d’un bulletin d’information.
On accuse la Médiature d’être un melting-pot ou un salad bowl ?
Ahmat Yacoub : Je n’ai pas compris, que voulez-vous dire par là ?
On dit que l’institution était un garage qui regorgeait des gens incompétents ?
Ahmat Yacoub : Non, je ne crois pas que cela soit vrai. C’était un acharnement gratuit. Il y avait des hautes personnalités, des anciens ministres, des généraux qui, avec le temps ont acquis une connaissance dans le domaine. Mais le fait que l’institution n’a pas réussi à communiquer sur ses activités dont certaines nécessitent la discrétion, elle s’est exposée à une désinformation et une diffamation. Et c’est une grande perte pour le pays de mettre dans la rue un personnel de qualité ayant acquis une connaissance grâce à des formations prises en charge par l’État.
Que pensez-vous de ceux qui demandent la suppression du Haut Conseil économique ?
Ahmat Yacoub : C’est une erreur de faire et de défaire les institutions dont la création a coûté cher à l’État. Une institution, on ne la supprime pas mais on la réforme.
Après une thèse de doctorat, vous avez écrit cinq ouvrages, puis vous venez de publier un ouvrage sur la gestion des conflits. En quoi consiste ce dernier ouvrage ?
Ahmat Yacoub : J’ai écrit 6 ouvrages. Le dernier qui vient de paraitre ce mois d’octobre 2020 est un examen attentif des moyens par lesquels les mécanismes de gestion des conflits conçoivent, répondent et élaborent les procédures de résolution. C’est aussi l’occasion d’examiner, dans les situations conflictuelles, le rôle de la médiation dans son rapport au droit coutumier et d’aborder « les forces et faiblesses des pratiques qui irriguent la médiation » parlementaire depuis son apparition. L’étude s’est aussi intéressée au développement de mécanismes de gestion des conflits, à la typologie des conflits en s’attachant aux traits communs de certains types d’institutions, les enjeux culturels, la consolidation de la paix et le rôle de la ‘Médiatologie’ sociologique particulièrement dans l’espace scolaire. Un chapitre sur la jeunesse, l’extrémisme et le rôle que peut jouer la ‘Médiatologie’ sociologique dans la prévention du conflit violent.
Êtes-vous prêt à diriger l’intuition réhabilitée si on vous le demande ?
Ahmat Yacoub : Je dis non si c’est sur la base de l’ancien statut obsolète, mais peut-être oui, si on accepte de la réformer avec un statut juridique répondant aux normes qu’exigent les instances des ombudsmans.
Avez-vous un dernier mot à dire ?
Ahmat Yacoub : A part vous remercier, je lance un appel aux tchadiens de tout faire pour consolider cette paix chèrement acquise car il faut voir ce qui se passe tout autour de nous, en Libye, au Nigeria et en Centrafrique.
Propos recueillis par Malick Mahamat.
Depuis la disparition de l’institution, il s’est refusé à commenter publiquement la décision du 1er Forum national inclusif mais à l’heure où un 2ème Forum se prépare, et où, à l'issue des pré-forums décentralisés, la plupart des provinces appellent à la réhabilitation de la Médiature, Ahmat Yacoub a accepté de se confier à nous.
Alwihda Info : N’êtes-vous pas déçu de la suppression de la Médiature de la République au Tchad en 2018 ? Quelles sont, d’après vous, les raisons de sa suppression ?
Ahmat Yacoub : Vous savez que la suppression de la Médiature se justifie par le fait que beaucoup ne comprennent pas le rôle exact de l’institution. Ils croient qu’elle est limitée à la gestion des conflits opposant l’État aux mouvements politico-militaires et il est déplorable qu’on trouve jusqu’à des hautes personnalités comme de ministres et de députés qui sont bloqués sur cette définition. Or, la Médiature est un des mécanismes de protection non juridictionnelle des droits fondamentaux de la personne. C’est un mécanisme de gestion des conflits développé et modernisé, avec pour mission principale de corriger et de prévenir les injustices causées aux citoyens par une autorité administrative publique. Créé pour la première fois par les suédois en 1809, l’Ombudsman a pour rôle de servir d’intermédiaire entre l’administration et les administrés et depuis, elle a évolué pour être dans certains pays démocratiques soit une AAI « Autorité Administrative Indépendante » à l’image de la France ou AAIS (Administration Administrative Indépendante spéciale) comme en Espagne et au Portugal.
Pouvez-vous nous expliquer en quoi les AAI et AAIS représentent une évolution de l’institution ?
Ahmat Yacoub : De réformes en réformes, des pays comme l’Espagne, le Portugal puis la France, ont adopté une stratégie qui a consisté à fusionner plusieurs Autorités Administratives Institutionnelles (AAI) pour en faire une importante Autorité Administrative Indépendante Spécialisée (AAIS) dont l’objet principal, justifient-ils, le renforcement de l’institution dans le domaine de l’hybridité et de l’indépendance aux pouvoirs. Et c’est au moment où le Monde adapte et adopte ce mécanisme efficace de gestion des conflits, le destin a voulu que la Médiature tchadienne soit supprimée en mars 2018.
Pourquoi n’avez-vous pas défendu l’institution avant et lors du Forum ?
Ahmat Yacoub : Écoutez, c’est très compliqué puisque la décision était déjà prise sur la base d’un acharnement gratuit contre l’institution et j’ai compris qu’il n’y a rien à faire. Le Médiateur s’est déployé pour la défendre et je lui ai dit clairement dès le départ que c’est une peine perdue. Nous avons été début mars 2018 en mission à Abeché où nous avons réussi à gérer un conflit meurtrier opposant Arabes et Ouaddaiens et avons par la suite crée une commission de suivi. Mais deux semaines après, l’institution a été supprimée. Il était sage de la réformer et nous avons présenté un projet de réforme qui n’a même pas été consulté.
Pouvez-vous nous dire en quelques mots ce que l’institution tchadienne a pu faire en 20 ans d’existence ?
Ahmat Yacoub : Selon une étude statistique que j’ai moi-même effectuée en 2017, 65% de ses activités entre 2000 et 2010 étaient consacrées au conflit politico-militaire, et ce dans le seul but de contribuer à ramener la paix sociale dans un pays déchiré par quatre décennies de guerre fratricide avec des interférences étrangères.
C’est l’occasion de le souligner que 15 000 combattants ont regagné la légalité. 35% des conflits gérés étaient des dossiers qui échappent aux voies normales. On note qu'il n’y a pas que les conflits d’ordre classique opposant administrés et administration que la Médiation tchadienne a eu à faire mais il y a de conflits inter/intracommunautaires, de chefferie, fonciers ou agriculteurs/éleveurs, etc. Dans nos actions, nous avons traité de conflits opposant de hautes personnalités comme de ministres à de simples citoyens. Dans beaucoup de pays comme en Ouganda, en Afrique du Sud, au Burundi, l’Institution est modernisée. En plus de son rôle régalien, elle devient un mécanisme de lutte contre la corruption. Au Tchad, si elle est réformée, elle serait un mécanisme important de lutte contre la corruption pour appuyer la politique du Chef de l’État entreprise contre la corruption et le détournement.
À un moment où les langues se délient sur la réhabilitation de la Médiature, croyez-vous que ce soit nécessaire ?
Ahmat Yacoub : En effet, tous les pays démocrates sont unanimes sur le fait que la médiation est un mécanisme essentiel qui apportera des éléments positifs à la gestion des conflits. Elle contribue à éloigner les conflits en proposant des solutions négociées et consensuelles aux parties en conflit. Toutefois, l’efficacité de l’institution dépend avant tout de son adaptation aux valeurs socioculturelles du temps et de l’espace. Qu’il s’agisse des conflits impliquant administration et administré(s), inter ou intracommunautaire, ce sont après tout, des conflits de sociétés. Mais la réhabiliter au Tchad telle quelle était n’est pas nécessaire car il faut une institution forte qui respecte les conditions de son éligibilité dans les sphères internationales.
Ça veut dire quoi ? pouvez-vous expliquer ?
Ahmat Yacoub : L’institution telle qu’elle était s’est privée de beaucoup d’avantages. D’abord son éligibilité aux formations, aux assistances et aux aides a toujours été remise en cause par les instances internationales des ombudsmans. Elle n’a jamais exercé le droit de vote aux assemblées ordinaires ou extraordinaires des membres ou participer aux instances administratives et décisionnelles des associations internationales des Médiateurs. En sommes, notre Médiature n’a jamais été reconnue par les organes internationaux de l’Ombudsman comme l’AOMF, l’AOM, l’UEMOA, l’AMP. Même invités dans de conférences, nous ne sommes pas autorisés à siéger dans des assemblées et interdits de vote puisque notre institution ne répondait pas aux normes. C’était ça la réalité.
Quelles sont ces normes d’après-vous ?
Ahmat Yacoub : Pas d’après moi mais selon les instances internationales, Il y a, au moins trois exigences essentielles à respecter : 1/ le médiateur doit être nommé/ élu ou désigné par le Parlement même si il peut être consenti par le chef de l’État comme le cas de la France ; 2/ son mandat doit être défini 3/ il doit désigner son staff sur la base d’un dossier c’est-à-dire il a le libre choix de ses collaborateurs et la possibilité de leur déléguer des responsabilités administratives et des charges d’enquêtes. Et je ne crois pas que cela est possible pour l’instant.
Vous voulez dire qu’il faut copier sur la France comme nous avons l’habitude de le faire en Afrique francophone ?
Ahmat Yacoub : Pas du tout. Je n’ai pas dit cela car en tant qu’expert en la matière, je dirai que la Médiature en France qui est déjà réformée en Défenseur des Droits n’est pas un bon exemple à prendre. En 2016, au Canada, lors d’une conférence, je n’ai pas manqué d’attirer l’attention du Médiateur français sur ce que je pense. Il y a des pays exemplaires en Afrique comme le Burundi, l’Afrique du Sud, le Burkina, l’Ouganda, et en Europe les pays Scandinaves. En Amérique c’est le Canada. Les pays les plus évolués sont l’Espagne et le Portugal qui ont créé une AAIS, un tout en un, regroupant plusieurs AAI. En France, il y a une quarantaine de AAI alors qu’au Tchad, il n’y a que deux seulement.
Si les gens ignorent le rôle exact de l’institution, ne croyez-vous pas que vous avez failli à votre mission de communiquer ?
Ahmat Yacoub : Exact, nous avons une part de responsabilité et avons échoué dans la communication puisque nous ne disposons ni d’un site, ni d’un bulletin d’information.
On accuse la Médiature d’être un melting-pot ou un salad bowl ?
Ahmat Yacoub : Je n’ai pas compris, que voulez-vous dire par là ?
On dit que l’institution était un garage qui regorgeait des gens incompétents ?
Ahmat Yacoub : Non, je ne crois pas que cela soit vrai. C’était un acharnement gratuit. Il y avait des hautes personnalités, des anciens ministres, des généraux qui, avec le temps ont acquis une connaissance dans le domaine. Mais le fait que l’institution n’a pas réussi à communiquer sur ses activités dont certaines nécessitent la discrétion, elle s’est exposée à une désinformation et une diffamation. Et c’est une grande perte pour le pays de mettre dans la rue un personnel de qualité ayant acquis une connaissance grâce à des formations prises en charge par l’État.
Que pensez-vous de ceux qui demandent la suppression du Haut Conseil économique ?
Ahmat Yacoub : C’est une erreur de faire et de défaire les institutions dont la création a coûté cher à l’État. Une institution, on ne la supprime pas mais on la réforme.
Après une thèse de doctorat, vous avez écrit cinq ouvrages, puis vous venez de publier un ouvrage sur la gestion des conflits. En quoi consiste ce dernier ouvrage ?
Ahmat Yacoub : J’ai écrit 6 ouvrages. Le dernier qui vient de paraitre ce mois d’octobre 2020 est un examen attentif des moyens par lesquels les mécanismes de gestion des conflits conçoivent, répondent et élaborent les procédures de résolution. C’est aussi l’occasion d’examiner, dans les situations conflictuelles, le rôle de la médiation dans son rapport au droit coutumier et d’aborder « les forces et faiblesses des pratiques qui irriguent la médiation » parlementaire depuis son apparition. L’étude s’est aussi intéressée au développement de mécanismes de gestion des conflits, à la typologie des conflits en s’attachant aux traits communs de certains types d’institutions, les enjeux culturels, la consolidation de la paix et le rôle de la ‘Médiatologie’ sociologique particulièrement dans l’espace scolaire. Un chapitre sur la jeunesse, l’extrémisme et le rôle que peut jouer la ‘Médiatologie’ sociologique dans la prévention du conflit violent.
Êtes-vous prêt à diriger l’intuition réhabilitée si on vous le demande ?
Ahmat Yacoub : Je dis non si c’est sur la base de l’ancien statut obsolète, mais peut-être oui, si on accepte de la réformer avec un statut juridique répondant aux normes qu’exigent les instances des ombudsmans.
Avez-vous un dernier mot à dire ?
Ahmat Yacoub : A part vous remercier, je lance un appel aux tchadiens de tout faire pour consolider cette paix chèrement acquise car il faut voir ce qui se passe tout autour de nous, en Libye, au Nigeria et en Centrafrique.
Propos recueillis par Malick Mahamat.