L’exploitation sexuelle dans les écoles africaines est devenue un phénomène tellement répandu que les élèves ont inventé leurs propres termes, afin de faire référence aux relations sexuelles qu’ils ont avec leurs enseignants.
Qu’il s’agisse de "notes sexuellement transmissibles" ou de "FS" pour "fatigue sexuelle", en référence à l’épuisement causé par les divers rapports sexuels que les élèves ont avec leurs professeurs, ces termes argotiques rendent compte de la prévalence de l’exploitation sexuelle au sein des écoles africaines.
Cette terminologie a été découverte lors des recherches effectuées dans le cadre du dernier rapport de Plan International (PI) intitulé "Apprendre sans peur", qui s’inscrit dans la campagne mondiale de l’organisation visant à mettre un terme de la violence dans les écoles.
"Nous avions conscience de l’existence du problème depuis plusieurs années, mais nous ne disposions que d’éléments anecdotiques relatifs à la violence et à ses effets", a déclaré John CHALONER, le directeur régional de Plan pour l’Afrique de l’Ouest et du centre. "Lors de l’élaboration de ce rapport, nous avons parlé aux enfants, aux enseignants et aux parents. En conséquence, nous travaillons désormais à partir de preuves, et non des ouï-dire".
Le danger de l’abandon scolaire
Alors que les enfants reprennent le chemin de l’école à travers l’Afrique, le rapport révèle des taux alarmants de violence, qui entravent les efforts des gouvernements à offrir une éducation de qualité aux jeunes. En effet, le rapport conclut que de nombreux garçons et jeunes filles abandonnent l’école après avoir subi des violences sexuelles ou des châtiments corporels.
"Nos enseignants devraient être là pour nous apprendre et pas pour nous toucher là où nous ne voulons pas" a confié à PI une jeune Ougandaise de 15 ans. "J’ai l’impression de disparaître du monde si quelqu’un qui est censé me protéger me détruit".
Selon le rapport, des recherches conduites en Ouganda ont relevé que huit pour cent des garçons et des filles de 16 et 17 ans interrogés avaient eu des rapports sexuels avec leurs enseignants. En Afrique du Sud, des enseignants ont été reconnus coupables d’au moins un tiers des viols d’enfant. Une enquête menée dans 10 villages béninois a révélé que 34 pour cent des enfants avaient subi des actes de violence sexuelle dans leur école.
Les garçons souffrent généralement de châtiments corporels plus violents, et parfois meurtriers, de la part de leurs enseignants que les filles. En revanche, ces dernières sont davantage victimes de violence sexuelle et d’exploitation. Toujours selon le rapport, les filles sont confrontées à la double menace de la violence sexuelle de la part des enseignants ou autres tuteurs, et des autres élèves masculins, lorsqu’elles se trouvent à l’école, ou sur le chemin de l’école.
"Les enseignants justifiaient l’exploitation sexuelle des élèves filles par le fait que leurs vêtements et leur comportement étaient provocants et qu’ils étaient éloignés de chez eux et en manque sexuel", peut-on lire dans le rapport de PI.
Echanges sexuels
De plus, l’apparente connivence de certaines jeunes filles peut apparaître comme une "zone d’ombre" dans cette situation.
Les expressions "Afrivente" ou "vente gratuite" ont été inventées pour décrire les filles qui ne portent pas de sous-vêtement, afin d’inciter les professeurs à avoir des rapports sexuels et d’obtenir en échange des bonnes notes, ou des "biens sexuellement transmissibles", tels que de la nourriture, des fournitures scolaires ou le règlement des frais de scolarité.
Mais ces jeunes filles ne sont pas les instigatrices, a rappelé ATOUMANE DIAW, secrétaire général du Syndicat national des enseignants de l’élémentaire (SNEEL), du Sénégal.
"Ces enfants sont souvent encouragées par leurs parents. Croyez-vous vraiment qu’une jeune fille de 10 ans s’achèterait elle-même des vêtements ‘sexy’ ? Non, c’est le système qui veut cela, c’est la société qui est corrompue. Ces familles pauvres ont besoin d’une aide [financière] afin qu’elles ne se retrouvent dans une telle situation".
Outre une aide financière, ATOUMANE DIAW suggère la mise en œuvre de mesures pratiques au sein des écoles : "un uniforme simple afin que tous les élèves se ressemblent ; des toilettes séparées pour les garçons, les filles et les enseignants ; des mesures de surveillance afin que les enseignants ne se retrouvent pas seuls avec un élève après les cours".
Selon PI, la pauvreté encourage les abus. Les enfants sont de plus en plus responsables du bien-être économique de leur famille, les enseignants sont souvent sous-payés, ou ne sont pas payés du tout, et certains d’entre eux considèrent les faveurs sexuelles obtenues auprès de leurs élèves comme une "compensation".
Les auteurs du rapport ont indiqué que dans de nombreuses cultures africaines, les châtiments corporels étaient souvent perçus comme une mesure disciplinaire acceptable. En outre, les normes sociales qui encouragent l’agressivité masculine et la passivité féminine sont également considérées être à l’origine de diverses formes de violence à l’encontre des jeunes filles.
Le besoin de parler
"Il faut que nous sensibilisions les populations afin de résoudre le problème de la violence avant qu’il n’éclate", a souligné ATOUMANE DIAW.
"Notre campagne vise à sensibiliser davantage les enseignants. Nous informons les enfants de leurs droits et de leurs valeurs. Les lois doivent être harmonisées et appliquées dans différents pays. Nous devons progresser, nous battre ensemble".
Au Kenya, le ministère de l’Education a élaboré des lignes directrices relatives à la sécurité à l’école, après la récente vague d’émeutes meurtrières dans les écoles secondaires.
D’après le rapport de PI, les actes de violence, et notamment les actes de violence sexuelle, perpétrés dans les écoles ne sont généralement pas signalés pour des raisons culturelles, ou parce que les élèves ont honte ou ne savent vers qui se tourner pour se confier. Le rapport indique également que les enseignants hésitent à signaler les abus commis par leurs collègues.
"En tant qu’adultes, nous devons ouvrir les yeux et être vigilants", a insisté John CHALONER de PI. "Les enfants ont besoin d’exutoires, comme des lignes d’écoute. Ils pourraient ainsi s’exprimer. Nous devons faire passer le message, afin que les enfants se soient plus blessés par les personnes censées les protéger".
La violence contre les enfants dans l’environnement scolaire est un problème mondial qui a un effet dévastateur sur la vie de millions d’enfants chaque année.
La campagne Apprendre Sans Peur de Plan a pour objet de remettre en cause la culture de la complaisance qui entoure la violence contre les enfants dans l’environnement scolaire. Elle porte essentiellement sur les châtiments corporels, la violence sexuelle et les brimades.
S’appuyant sur les articles de la Convention des Nations Unies relative aux Droits de l’Enfant et sur l’éthique des Objectifs du Millénaire pour le développement, la campagne va amplifier l’effet suscité par l’Etude du Secrétaire Général des Nations Unies sur la violence à l’encontre des enfants, en 2006.
La violence exercée contre les enfants est une violation de leurs droits qui a des conséquences dévastatrices à long terme. Non seulement elle est cruelle et injuste, mais elle est aussi prévisible et évitable.
Châtiments corporels
Ampleur
Les châtiments corporels infligés à l’école peuvent prendre de nombreuses formes différentes, qui vont des coups portés avec la main par l’enseignant, aux brûlures et à l’obligation imposée aux enfants de rester assis pendant des périodes prolongées, dans des positions inconfortables.
Quatre-vingt-dix des 197 pays suivis par la Global Initiative to End All Corporal Punishment of Children autorisent les enseignants, par la loi, à recourir aux châtiments corporels sur les enfants. Même dans les pays où ces châtiments sont illégaux, les lois de protection des enfants ne sont pas souvent appliquées.
Les garçons sont généralement soumis par leurs enseignants à une violence plus forte que les filles. En Egypte, par exemple, 80 pour cent des garçons ont fait l’objet de châtiments corporels à l’école, contre 67 pour cent de filles. Un quart des enfants punis a déclaré avoir eu des blessures consécutives à ces punitions. De plus, les enfants qui font déjà l’objet de discriminations fondées par exemple sur un handicap, la pauvreté, la caste, la classe sociale, l’appartenance ethnique et la sexualité risquent plus de subir des châtiments corporels que leurs pairs.
Les châtiments corporels à l’école ne sont pas limités aux pays en développement. Ils sont légaux en Corée, en France et dans un certain nombre d’états d’Australie et des Etats-Unis.
Aux Etats-Unis, les écoles sont les seules institutions où le recours à la violence est légal. Il est interdit dans les hôpitaux psychiatriques, les structures militaires ou carcérales.
Causes
Les châtiments corporels sont souvent permis au nom de la tradition et parfois de la religion. L’impact censé être bénéfique sur le comportement de l’enfant est aussi fréquemment utilisé comme argument pour défendre les punitions physiques comme méthode disciplinaire.
Dans certains pays, frapper un enfant est considéré comme un “droit” des parents et des enseignants. En réalité, les châtiments corporels risquent plus de déclencher chez l’enfant des actes violents que d’améliorer son comportement.
Même là où les châtiments corporels sont proscrits ou limités par la loi, leur acceptabilité culturelle favorise souvent une application peu rigide de la loi. Dans de nombreux pays, les auteurs présumés sont rarement rappelés à leurs responsabilités.
Ces problèmes sont rendus plus compliqués dans les pays où les enseignants sont peu formés et motivés. En Equateur, ils sont nombreux à percevoir de bas salaires et à avoir une formation insuffisante aux techniques disciplinaires positives. Ils recourent donc souvent à des méthodes basées sur la punition et la violence physique pour gérer leurs classes.
Conséquences
Dans les pires des cas, les châtiments corporels peuvent occasionner des blessures physiques, voire entraîner la mort. Dans les cas les moins graves, ils ont un effet préjudiciable sur l’apprentissage des enfants. Ceux qui sont confrontés aux châtiments corporels à l’école sont aussi ceux risquent le plus de quitter le système éducatif.
Une étude réalisée au Népal, où les châtiments corporels sont courants, a montré que 14 pour cent des abandons scolaires pouvaient être attribués à la peur de l’enseignant.
Les châtiments corporels risquent plus de déclencher chez l’enfant des actes violents que d’améliorer son comportement. Les enfants qui sont soumis à des punitions physiques sont aussi moins enclins à avoir un comportement altruiste ou à se sentir en empathie avec les autres.
A plus long terme, les châtiments corporels sont associés au suicide, à la dépression et à la dépendance alcoolique. Les victimes présenteront plus de risques d’avoir des comportements désordonnés et agressifs et de recourir à la violence physique sur leur conjoint et leurs propres enfants, perpétuant ainsi le cycle de la violence dans leurs familles et leurs communautés.
Violences sexuelles
Ampleur
L’Organisation mondiale de la Santé a estimé que 150 millions de filles et 73 millions de garçons ont été violés ou ont subi d’autres formes de violence sexuelle. Mais il n’y a actuellement aucune estimation fiable du nombre de ces abus en milieu scolaire.
Nous savons cependant que la violence sexuelle est habituellement infligée par des personnes connues de l’enfant et que les abus sexuels à l’école sont un problème majeur dans de nombreux pays.
Des recherches menées en Ouganda ont constaté que huit pour cent des garçons et des filles de 16 et 17 ans interrogés avaient eu des rapports sexuels avec leurs enseignants et 12 pour cent avec le personnel auxiliaire. En Equateur, une étude portant sur des adolescentes victimes de violences sexuelles a indiqué que 37 pour cent d’entre elles désignaient leurs enseignants comme étant les auteurs.
Ce sont les filles qui sont les plus exposées au risque de violence sexuelle à l’école et elles sont souvent confrontées à la double menace des enseignants et des élèves masculins. Les études réalisées en Afrique et en Amérique latine ont noté que certaines filles subissaient des pressions sexuelles de la part des enseignants, assorties de menaces par rapport à leurs notes si elles ne coopéraient pas. Ces abus sont souvent considérés comme faisant inéluctablement partie de la vie scolaire et les autorités éducatives sont souvent réticentes à s’attaquer au problème ou à traîner leurs auteurs en justice.
En Thaïlande, le Centre de protection des enfants et des familles a déclaré qu’au moins un enseignant abuse sexuellement d’un élève chaque semaine. Une étude réalisée aux Pays-Bas a relevé que 27 pour cent des élèves ont rapporté avoir été sexuellement harcelés par le personnel scolaire et en Suède, 49 pour cent des filles de 17 et 18 ans estimaient que le harcèlement sexuel à l’école était un problème significatif.
Causes
Les causes de la violence sexuelle varient considérablement, mais le comportement des enseignants et les stéréotypes de genre traditionnels sont des facteurs clé. En ne prenant pas au sérieux les plaintes d’abus sexuels, les enseignants et les autorités scolaires véhiculent le message selon lequel les abus sexuels seront tolérés. De plus, l’absence de poursuites publiques dans de nombreux pays signifie que les auteurs d’abus ne sont pas mis face à leurs responsabilités.
Dans les sociétés où les femmes ont un statut inférieur, les filles risquent plus de souffrir de violences sexuelles à l’école. En Amérique latine, en Asie du Sud et en Asie du Sud-est islamique, la violence sexuelle à l’encontre des filles tend à rester un crime silencieux à cause de l’importance accordée à la pureté sexuelle des filles.
Dans certaines régions d’Asie du Sud, le viol est plus que tout considéré comme une offense à l’honneur des membres masculins de la famille. En Amérique latine, les filles enceintes sont souvent expulsées de l’école et celles qui sont infectées par le VIH doivent faire face à la discrimination.
Dans certains pays d’Afrique, la croyance “populaire” selon laquelle on peut guérir du SIDA par des rapports sexuels avec une vierge a entraîné l’abus d’élèves handicapées qui sont vues comme des cibles faciles et dont on pense (pas toujours à bon escient) qu’elles ne sont pas sexuellement actives.
Conséquences
Les victimes de violence sexuelle souffrent de traumatismes physiques et psychologiques et elles courent le risque d’infections sexuellement transmissibles, y compris du VIH. Les jeunes filles peuvent aussi souffrir de graves répercussions sur leur santé, notamment des conséquences d’une grossesse non désirée : décès, avortement non médicalisé, stigmatisation sociale et obligation d’abandonner l’école.
Une étude réalisée en Australie a fait apparaître des liens à long terme entre les abus sexuels dans l’enfance et les problèmes de santé sexuelle et mentale, de violence domestique et d’autres problèmes dans les relations intimes plus tard dans la vie. Certains enfants se tournent vers l’alcool ou les drogues comme mécanismes d’adaptation et ils peuvent en arriver eux-mêmes à devenir auteurs de comportements délinquants.
La violence sexuelle constitue un obstacle majeur à l’accès des filles et des jeunes femmes à l’éducation et à leur capacité d’en tirer profit. C’est un puissant facteur qui décourage les parents de scolariser leurs filles, encourage les filles à éviter l’école et fait baisser leurs résultats scolaires.
Brimades
Ampleur
Les brimades sont un comportement courant dans les écoles du monde entier. Les recherches réalisées dans une série de pays ont noté qu’une proportion comprise entre un cinquième des enfants (Chine) et les deux-tiers (Zambie) rapportaient avoir subi des brutalités ou des brimades au cours des 30 jours précédents.
Dans une enquête du Kenya portant sur 1 000 élèves des écoles publiques de Nairobi, entre 63,2 et 81,8 pour cent des enfants ont rapporté différents types d’intimidations ; dans un district du Bénin, il est apparu que 82 pour cent des enseignants et 92 pour cent des élèves confirmaient l’existence d’actes d’intimidation. Une étude menée à Bogota (Colombie) sur plus de 1 000 participants a montré que 30 pour cent des garçons et 17 pour cent des filles avaient participé à une bagarre. Un cinquième des répondants avait été victime de brimades quotidiennes.
Les garçons présentent généralement une plus forte probabilité que les filles d’être victimes et auteurs de brimades, même si ce n’est pas toujours le cas – les filles sont plus souvent des tyrans au Japon. Les garçons présentent une probabilité plus élevée de recourir à l’intimidation et à la violence, tandis que les filles tendent à recourir à des brimades verbales et sociales.
Le cyberharcèlement, l’utilisation de l’Internet, les téléphones mobiles et les autres technologies numériques utilisées pour menacer ou maltraiter les enfants signifient que les comportements d’intimidation peuvent maintenant se manifester à tout moment et presque sans limite.
Causes
Malgré l’ampleur du problème, seuls cinq des 66 pays examinés dans les recherches de Plan – Corée, Norvège, Sri Lanka, Royaume-Uni et Etats-Unis – ont des lois qui interdisent les brimades à l’école.
Les enfants sont souvent pris pour cible par les tyrans en raison de leur appartenance ethnique ou de leur sexualité. Les enfants handicapés offrent aussi plus de risques d’être la cible de brimades, de même que les enfants les plus jeunes, les plus petits et les plus faibles. Les brimades infligées aux enfants de familles touchées par le VIH est un phénomène qui prend de l’ampleur.
Les comportements d’intimidation sont liés à l’expérience de la violence à la maison, car les enfants apprennent que la violence est un mécanisme primaire de négociation des relations. Les enfants qui souffrent de violence familiale risquent plus d’agir en tyran et d’être victimes d’intimidations.
Les brutalités en général et les brimades en particulier sont aussi plus courantes dans les écoles surpeuplées, où la surveillance des adultes est inadéquate et les règlements scolaires peu efficaces. Les enfants qui fréquentent des écoles situées dans des quartiers violents ou pauvres, ou là où la discrimination contre les groupes ethniques ou autres est acceptée, sont aussi plus exposés à l’expérience de la violence.
La plupart des victimes ne parlent pas de ce qu’elles endurent, parce qu’elles se reprochent à elles-mêmes ce qui leur arrive et qu’elles ont honte. D’ailleurs, peu de victimes estiment que leur école prendra de vraies mesures pour améliorer la situation. Les enfants harcelés tendent à avoir un réseau réduit d’amis susceptibles de leur apporter soutien et protection.
Il existe aussi des données indiquant que les difficultés économiques et les inégalités sociales sont des facteurs clés qui alimentent à la fois les brimades et la violence sexuelle dans un certain nombre de pays. Les niveaux croissants de privations, d’inégalités et d’exclusion sociale jouent un grand rôle dans la violence scolaire.
Conséquences
Les victimes de brimades peuvent perdre leur estime de soi, ressentir de la honte, souffrir d’anxiété et finir par détester l’école. Elles font souvent l’école buissonnière pour éviter d’être harcelées. Celles qui restent dans le système scolaire ont souvent des problèmes de concentration et des troubles de l’apprentissage. D’autres réagissent par des comportements agressifs, brutalisant parfois d’autres camarades dans le but de retrouver un statut.
Plus grave encore, les victimes de brimades souffrent d’un stress accru et elles ont plus de chances de sombrer dans les comportements de dépendance aux substances addictives et de se suicider.
Les enfants victimes de brimades sont cinq fois plus exposés à la dépression que leurs pairs et les filles risquent huit fois plus d’être suicidaires.
Mais les tyrans ont aussi leurs problèmes – ils sont plus exposés à l’anxiété et à la dépression et ils présentent un risque accru de suicide et d’automutilation.
Un certain nombre d’études réalisées en Afrique suggèrent que l’expérience de brimades pendant l’enfance augmente les comportements antisociaux et la prise de risque à l’âge adulte. Aux Etats-Unis, 60 pour cent des auteurs de brimades auront au moins une condamnation pénale avant l’âge de 24 ans.
Lutter contre la violence à l’école : quelles solutions efficaces ?
Bien que les données factuelles disponibles identifient des interventions qui ont contribué à réduire la violence scolaire, il est important de comprendre le contexte social, politique et culturel dans lequel ces programmes sont proposés. Ce qui est efficace dans une communauté, un pays ou une région peut ne pas fonctionner ailleurs.
Interventions locales
Néanmoins, les recherches disponibles tendent à montrer que les stratégies locales les plus efficaces pour lutter contre la violence scolaire sont celles qui sont centrées sur l’école elle-même, par exemple l’adoption de techniques pédagogiques nouvelles dans la formation des enseignants, la sensibilisation aux droits de l’enfant et l’établissement de règles claires par rapport à la conduite à l’école.
L’engagement et l’appui actif des adultes, en particulier des enseignants et des parents, est essentiel et il exige souvent une formation des parents.
Beaucoup dépend aussi de la façon dont l’école met en œuvre le changement. Les écoles ayant déjà une organisation proactive et démocratique, avec des liens forts avec leurs communautés, ont de plus grandes chances de réussir.
Les programmes efficaces sont généralement ceux qui reposent sur l’encouragement et non sur la répression. Les programmes de type formation militaire – dans les pays où ils ont été introduits – n’ont pas réduit le nombre d’agressions.
Sensibiliser les enfants à leurs droits et encourager leur participation au gouvernement d’école sont deux actions d’importance capitale pour faire échec aux environnements scolaires autoritaires et favoriser la discipline non violente.
Mécanismes juridiques et sociaux
L’interdiction légale de la violence à l’école est une première étape essentielle pour offrir des écoles sûres aux enfants. Si la violence n’est pas proscrite, il devient difficile de convaincre les communautés, les autorités scolaires et les parents qu’elle est inacceptable.
Une école qui tolère une forme de violence contre les enfants – par exemple les châtiments corporels – est aussi susceptible d’être laxiste sur d’autres formes.
En effet, les différentes formes de violence scolaire sont liées. Une fille qui se soumet et accorde des faveurs sexuelles à un enseignant espérera ainsi éviter d’être frappée, alors qu’une élève qui refuse ses avances risque de recevoir des coups.
Actuellement, on prête très peu attention à la qualité des lois adoptées pour lutter contre la violence à l’école ou à leur application. Le contraste est frappant avec les débats de politique portant sur la violence à l’encontre des filles et des femmes où l’accent est mis fortement sur les mesures juridiques.
Mais les lois ne suffisent pas. Une application forte est la prochaine étape nécessaire pour réduire le nombre d’enfants qui souffrent de la violence à l’école. Si les lois ne sont pas appliquées, elles perdent une grande partie de leur pertinence.
De même, les ressources sont essentielles – l’affectation de budgets suffisants et sécurisés garantit d’une part le financement de la mise en œuvre de changements positifs dans les écoles et signale d’autre part un engagement politique à s’attaquer au problème.