Accueil
Envoyer à un ami
Imprimer
Grand
Petit
Partager
TCHAD

L’excision au Tchad, une pratique mortelle au-delà des lois (2/2)


Alwihda Info | Par Koffi Dieng - 21 Février 2024


Dans le sud du Tchad, l’excision prive les femmes de leurs droits sur leurs corps et leurs désirs. Au-delà de tout cadre juridique, cette pratique persistante peut s’avérer mortelle.


Illustration © Pixabay
Illustration © Pixabay
Réalisées sans anesthésie dans des conditions sanitaires précaires et à l’aide d’outils rudimentaires, l’excision est bien souvent suivie de complications. Selon l’Enquête Démographique et de Santé (EDST-II), menée sur l’ensemble du territoire en 2004 par l’Institut National de la Statistique, des Études Économiques et Démographiques (INSEED), près des trois-quarts des femmes victimes (73 %) ont eu, au moins, une complication. Entre autres, la mauvaise cicatrisation des plaies rend les accouchements difficiles et les risques sceptiques liés au manque de stérilisation favorisent la stérilité des femmes. Dans certains cas, l’excision tue. Si le taux de décès des suites de cette pratique n’est pas précisément recensé, de nombreux organismes l’estiment à des centaines chaque année.

La loi et son mutisme coupable

Pourtant, l’excision est bel et bien interdite par la législation tchadienne depuis 2002. La loi n°006 sur la Santé de la Reproduction condamne toutes les violences faites aux femmes, y compris les Mutilations Sexuelles Féminines (MSF). Elle répertorie donc officiellement l’excision comme acte de violence, faisant fi de la tradition.

Dans les régions où elle est encore massivement perpétrée, le cadre légal est systématiquement ignoré et contourné. Pire encore, il a poussé les communautés à opérer en cachette, forçant à les familles à se tourner vers des exciseuses n’ayant aucune connaissance médicale, agissant dans des conditions sanitaires d’autant plus précaires.

Épiphanie Nodjikoua Dionrang, présidente de la Ligue tchadienne des droits des femmes déplore une loi inefficace : « Du côté du gouvernement, (…) ils ne mettent pas vraiment la pression pour punir les auteurs. On est toujours dans cette optique que ce sont nos us et coutumes, c’est notre culture et qu’on doit le faire. » dénonce-t-elle.

Si la législation n’est pas respectée, c’est sans doute parce qu’elle peine à prévaloir sur la loi du silence. Au sein même de ses lignes, sans doute par pudeur, la loi n°006 ne définit pas clairement les MSF qu’elle interdit.

Éduquer et sensibiliser, une femme après l’autre

Dans le sud du pays, plusieurs dizaines de femmes victimes d’excision militent pour la fin de cette pratique. Au nom de l’amour qu’elles portent à leurs sœurs et leurs filles, mais aussi de celui qu’elles portent aux petites filles qu’elles ont un jour été, elles tentent de sensibiliser leur communauté. Selon elles, l’éducation est la clé de l’abandon d’une telle pratique. Là où la loi semble échouer, ces femmes sont déterminées à éveiller les consciences et amener leurs pairs à remettre en question la tradition. Si la tâche paraît ardue, chaque jeune fille demeurant « entière » représente une victoire de plus sur les mœurs.



Pour toute information, contactez-nous au : +(235) 99267667 ; 62883277 ; 66267667 (Bureau N'Djamena)