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TCHAD

Tchad : Kemba Didah Alain ou la conviction d’une lutte responsable


Alwihda Info | Par Info Alwihda - 18 Avril 2020



Kemba Didah Alain. © DR
Kemba Didah Alain. © DR
Dans le milieu de lutte pour les droits humains, ils sont peu nombreux à maintenir le cap, face à un régime prêt à user de tous les moyens pour les dissuader. A 25 ans, Kemba Didah Alain a été mis en prison trois fois de suite entre 2016 et 2019 pour son engagement et contraint parfois à quitter le pays pour des raisons de sécurité. Portrait de celui qui était le porte-parole du Mouvement Citoyen Iyina entre 2017 et 2018. 

« J’estime que chacun de nous de par sa situation géographique, sociale, son origine ethnique ou sa religion a une part de contribution à apporter dans la construction de notre pays, en tant que citoyen ». C’est de cette façon que l’activiste et défenseur des droits humains Kemba Didah Alain voit la mission de chaque personne. Il n'a pas encore 20 ans, lorsqu’il a commencé à se faire connaitre dans le milieu des associations des jeunes.Epris de justice et de paix, l’ancien président de l’Association des Elèves et Etudiants pour le Développement du Tchad, une association estudiantine pour la promotion de la citoyenneté dans le milieu scolaire et estudiantin, puis Secrétaire Général Adjoint du Conseil National Consultatif de la Jeunesse du Tchad pour le Logone Occidental, Kemba Didah Alaina commencé à sensibiliser ses camarades de l’école sur la non-violence, la paix et autres maux qui gangrènent la société tchadienne avant de se lancer dans la lutte pour les droits des étudiants la première année d’université. « C’est la base de tout processus de développement durable. Notre pays a survécu à plusieurs périodes de bouleversement politique et social depuis les indépendances», relèveDidah Alain qui fait sienne l’assertion de Frantz Fanon qui dit « chaque génération, doit dans une relative opacité, trouver sa mission, la remplir ou la trahir».

Très engagé pour la cause commune, surtout de la jeunesse africaine dans sa globalité, Didah Alain s’inspire des grandes figures de lutte pour l’égalité des droits dont Thomas Sankara, Patrice Lumumba et Martin Luther King.

Mais c’est au sein du mouvement citoyen Iyina (Ndlr: nous sommes fatigués en arabe locale) que Kemba Didah Alain s’est fait remarquer le plus par ses sorties médiatiques et ses appels à la désobéissance civile. Un mouvement qui est tombé en disgrâce depuis plus d’un an, après que son fondateur a rencontré la première dame, causant la démission de ses membres. Sa démission de cette association lui laisse plus des enseignements que de regrets. « Je suis de nature à tirer de leçons que d’avoir de regrets. Je suis positif.  Je crois en ce que je fais et plus fermement en la jeunesse tchadienne qui relève le défi auquel elle fait face, même si plusieurs obstacles font obstruction. Ma démission du Mouvement Citoyen Iyina exprime cette constante dans mon engagement que je ne compte pas trahir sous aucune manière », ajoute, l’actuellement rapporteur national du Mouvement International Tournons la Page. Cette démission a renforcé son influence auprès des jeunes qui voient en lui une source d’inspiration.
 
De l’aveu d’un de ses camarades de lutte, il a un mental d’acier et est un guerrier. Mais soyez-en rassurer, le jeune activiste prône un engagement responsable, non violent.Ambitieux mais mesuré, il n’exclut pas l’idée de s’engager un jour en politique. « Je suis plutôt un promoteur de l’engagement à tous les niveaux, citoyens ou politiques.  Je ne sais pas pour l’instant si je vais m’engager un jour en politique mais c’est une option à ne pas exclure.Je suis déçu de nos hommes politiques comme la plupart de mes compatriotes, qui sont manqués d’objectivité, de cohérence et d’ambition. Nous vivons une situation où les gens s’engagent en politique pour se servir et non servir la société. C’est très désolant », déplore-t-il. Il définit la vie comme un voyage et pour vivre heureux, assure—t-il, l’on doit apprendre et partager. « Partisan du socialisme pur, j’estime que pour obtenir l’égalité sociale ou du moins réduire les inégalités, l’homme doit dans la sincérité tendre la main à son prochain », témoigne Didah qui croit à un monde juste et prospère à condition, ajoute-t-il que « les gens comprennent la nécessité d’être solidaire, en se mettant chacun au service de l’autre ».  « Je me suis vu un devoir de prendre ma responsabilité, en dénonçant tous les maux que connaissent mon pays. Je considère que ce combat est celui de notre génération, c’est pourquoi j’incite les jeunes à prendre leur responsabilité », annonce-t-il.  Il rêve d’un Tchad débarrassé de la mauvaise gouvernance et de l’identification communauto-réligieuse, de l’injustice sociale, l’irrespect des droits humains et l’exclusion d’une frange de sa population de la gestion du bien public.  « C’est comme le ’’i have a dream’’ du pasteur militant Martin Luther King prononcé devant le Lincoln Mémorial  durant la marche sur Washington pour l’emploi et la liberté des noirs le 28 Aout 1963 », s’est-il remémoré.

Passionné de la lecture et de l’écriture, Didah est co-auteur de plusieurs rapports sur la situation des droits humains au Tchad. Il a publié un livre aux éditions Edilivre à Paris en juin 2019 intitulée ’’La fille coupable’’, qui qui décrit une partie sombre de l’histoire du pays entre 1982 et 1990, sous le règne de l’ancien président tchadien Hissien Habré. «Plus de 25 ans après la Conférence Nationale Souveraine qui a jeté les bases d’un Tchad nouveau, nous vivons malheureusement la même situation en termes de confiscation du pouvoir, des violations flagrantes des droits humains, l’absence de dialogue sincère entre les acteurs sociaux et politiques», déplore le jeune écrivain qui précise que les dirigeants tchadiens doivent se servir du passé.

Né le 24 octobre 1994 à N’Djamena d’un enseignant et d’une ménagère, Aujourd’hui, Didah est consultant junior en sécurité digitale, spécialisé sur la plateforme Facebook et coordinateur du Centre d’Etudes pour le Développement et la Prévention de l’Extrémisme. Boursier du programme Trade Policy Training Centre in Africa(Tanzanie) de Lund University, l’activiste vient de terminer en novembre dernier son cours de master en politique commerciale et droit international de commerce.



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