
Le candidat tchadien n'a obtenu que 0,52 % des voix, le plaçant en dernière position, loin derrière les autres prétendants. Selon Manany, cette humiliation ne doit pas être relativisée : "le Tchad n’a pas simplement perdu une élection, il a été totalement ignoré."
Une diplomatie affaiblie et instrumentalisée
Acyl Adoum Manany impute ce "fiasco" à un affaiblissement progressif de la diplomatie tchadienne, qu'il estime avoir été "dépolitisée, puis instrumentalisée par un pouvoir qui confond gouvernance avec autorité militaire". Il critique l'accession au pouvoir du "président Kaka" (faisant référence à Mahamat Idriss Déby Itno) par la force et sans élection réelle, affirmant que depuis lors, la diplomatie n'est plus un outil d'influence mais un simple instrument au service du régime, gérée en vase clos, dépourvue de vision continentale, de stratégie régionale et de toute volonté de construire des alliances.
Cette situation, selon lui, explique le manque de soutien, même de la part des pays voisins, y compris ceux de la CEMAC. L'image "désastreuse" du Tchad sur la scène internationale est également pointée du doigt, avec l'exemple du Ministre des Affaires étrangères de l’époque apparaissant "armé et entouré de soldats" lors d'un coup d’État présumé en 2024. "Quand un diplomate devient un soldat, il n’y a plus de message de paix, plus de crédibilité, plus de rôle dans le concert des nations", déplore-t-il.
Un candidat solide, mais un lobbying inexistant
Le leader du MUTA reconnaît que le candidat présenté, Abbas Mahamat Tolli, avait un "profil solide" et n'était pas le problème. Ce qui a manqué, selon lui, c'est "tout le reste : aucun lobbying, aucune tournée régionale adéquate, aucune coalition solide, aucune dynamique". Il compare l'effort tchadien à un lancement de "bouteille à la mer sans cap, sans boussole, sans équipage".
Pour Acyl Adoum Manany, pendant que d'autres pays avancent et renforcent leur position, le Tchad "s’enfonce dans l’isolement". Le pays "ne pèse plus", "n’est plus écouté" et est devenu "spectateur des décisions qui comptent".
En conclusion, il lance un avertissement : "Cet échec cuisant à la BAD est une sonnette d’alarme. On ne peut pas se contenter de discours rassurants quand le respect, la crédibilité et l’influence du Tchad sur la scène continentale s’effondrent. Tant qu’on continuera à faire semblant que tout va bien, le pays continuera à reculer. Reconnaître la faillite gouvernementale, c’est le premier pas vers la reconstruction."

