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ANALYSE

L'Afrique dans le chaos du coronavirus


Alwihda Info | Par GBANDI Anatole - 17 Mars 2020



Un employé des services de santé utilise un thermomètre pour prendre la température à des personnels de cabine de la compagnie Ethiopian Airline, à Lagos, le mercredi 4 mars 2020. © Sipa Press
Un employé des services de santé utilise un thermomètre pour prendre la température à des personnels de cabine de la compagnie Ethiopian Airline, à Lagos, le mercredi 4 mars 2020. © Sipa Press
Personne, même pas les devins, même pas les sorciers, n'aurait pu prédire qu'un animalcule très contagieux, apparu en Chine, dans la province du Hubei, parviendrait en moins de deux mois à migrer sur la terre tout entière et à y semer le chaos. Il n'est pas exagéré de parler de panique sur la planète.

Obsédée par son réchauffement que certains dirigeants contestent, la Terre n'a pas vu venir le covid-19, qui la met aujourd'hui dans tous ses états. Il n'est pas exagéré de parler de guerre comme le président français "contre un ennemi invisible" et terriblement agressif. Partout où il sévit, le vocabulaire s'est militarisé : la France décrète la mobilisation générale, l'Espagne et le Portugal en alerte, Donald Trump déclare l'état d'urgence, la République Tchèque ferme ses frontières, la Belgique se met en quarantaine, l'Italie en plein chaos, Emmanuel Macron réunit un conseil de défense à l'Elysée etc.

Il semble que les pays européens aient été pris au dépourvu. Ils croyaient probablement que la Chine parviendrait à juguler l'épidémie dans ses frontières et à éviter au monde une pandémie. Mais nous vivons dans un monde globalisé, où les frontières n'existent que pour les pauvres, qui ne voyagent pas, où qui voyagent généralement clandestinement dans des rafiots, poussés par la misère ou le vent de la haine.

Les Européens avaient une autre raison de ne pas s'inquiéter : ils ont le meilleur système de santé au monde, les meilleurs praticiens et, avec les Américains, les meilleurs chercheurs. Mais jusqu'ici, ce système n'a pas été éprouvé par une grande pandémie. Le covid-19 est, selon Emmanuel Macron, "la pire crise sanitaire qu'est connue la France depuis un siècle." Peu avant ce constat lucide, quand les carences du système de santé italien sont apparues au grand jour, les Français ne se sont pas privés de critiquer son imprévoyance et son incurie.

1.REGLEMENT DE COMPTES EN PLEIN CHAOS

Aujourd'hui la panique a gagné la France, toute l'Europe et la terre entière. Un à un, comme des huîtres, les pays se retirent dans leurs coquilles. Du jour au lendemain, on découvre que le voisin tousse un peu fort. Et on lui ferme la porte au nez, au nom du principe de précaution. Paradoxalement, plusieurs pays ont fermé leurs frontières alors que le virus s'était déjà établi chez eux. En fermant ses frontières au coronavirus qui se trouve déjà chez elle, la Colombie met le holà du même coup à l'afflux des réfugiés vénézuéliens.

Dans l'Union européenne, tout se passe comme si chaque pays avait recouvré sa souveraineté : chacun gère ses malades en observant du coin de l'oeil ses voisins. L'Italie a beau crié au secours, personne ne l'entend, ou plutôt, c'est la lointaine Chine qui vole à son secours.

La première puissance du monde qui est aussi l'allier de l'Italie, non seulement ne lui prête pas assistance, mais interdit à ses citoyens ainsi qu'aux citoyens de vingt-quatre autres pays européens de s'approcher de son sanctuaire. Ils auraient contaminé des Américains après avoir été contaminés par des Chinois auxquels ils auraient ouvert les portes de l'Europe.

On voit bien ici que l'objet du courroux du président américain, c'est bien l'Union européenne qu'il aimerait casser ou transformer en un ectoplasme. Et pour le montrer à quiconque n'aurait pas compris, il laisse pendant deux jours la porte de son pays ouverte au citoyens britanniques, ses nouveaux amis, qui viennent de quitter le navire européen, avant de la leur fermer. Une observation s'impose ici : quand la Terre est menacée dans son existence, les hommes se replient sur eux-mêmes, c'est-à-dire sur la terre. Ils ne pensent ni à la lune inhospitalière ni à la lointaine Mars désolée. Quand la terre est menacée, notre planète de substitution reste la Terre.

2.ET L'AFRIQUE DANS TOUT ÇA ?

Pour le moment, ce sont des pays riches que le covid-19 est en train de ravager. Or les scientifiques de ces pays nous disent unanimement que le taux de létalité du virus n'est pas élevé : il oscille entre 0,6% en Corée du sud et 4,6% en Italie. Le problème, c'est qu'avec un taux de mortalité de 4,6%, il a réussi à paralyser l'Italie. Et donc il apparaît clairement que la dangerosité du virus réside bel et bien dans les dégâts disproportionnés qu'inflige son faible taux de mortalité. Combien de temps l'Italie peut-elle tenir dans la situation de paralysie où elle se trouve. Souhaitons qu'elle se redresse aussi promptement que la Chine.

Dans le contexte subsaharien, rien ne nous dit que ce taux de mortalité restera faible. Il pourrait même grimper de manière vertigineuse. Car dans certains pays, comme la République Centrafricaine, le système sanitaire a toujours été déficient. Un ancien ministre français de la Santé a, dans une émission, semblé contester le nombre de malades déclarés contaminés par le coronavirus en Afrique. Il n'a pas donné son estimation, mais j'ai immédiatement pensé aux pays en guerre, qui ne contrôlent plus leurs frontières, et qui n'ont pas assez de laboratoires pouvant diagnostiquer la maladie. J'ai pensé à la famine, qui s'allie généralement aux maladies les plus bénignes pour terrasser des hommes dans ces contrées.

Ces États que l'on dit faillis attendent généralement de l'aide des pays nantis ou de leurs associations ou de leurs organisations caritatives pour régler leurs problèmes de famine ou de santé. Ils pourraient être déçus cette fois-ci. Car les philanthropes occidentaux ne leur enverront pas de médicaments anticoronavirus (il n'y en a pas, du moins pas encore ), ils ne leur enverront pas non plus des masques, des respirateurs ni des flacons de gel hydroalcoolique ( ils n'en ont pas assez pour leurs propres populations), ils ne leur enverront pas non plus des médecins ( bien avant la pandémie, on parlait beaucoup des déserts médicaux en Italie, en France et dans d'autres pays européens ). Alors plutôt que d'attendre un hypothétique salut de l'étranger, nos pays feraient mieux de se préparer à livrer bataille tout seuls. Après tout, ils ont bien jugulé Ebola, un virus autrement plus dangereux et mortel que le coronavirus.

Ce dernier, selon les spécialistes, peut être combattu efficacement en se lavant régulièrement les mains avec du savon ou du gel hydroalcoolique, en toussant dans un mouchoir jetable, en évitant de serrer des mains, en se tenant à un mètre de son interlocuteur, en remisant l'accolade et la bise.

Enfin, la célérité avec laquelle le Maroc a décrété les mesures de confinement me semble d'une exemplarité incontestable. Car nous sommes bien en face d'une menace mortelle, d'un virus qui a pris de vitesse beaucoup de pays. Il faut maintenant le prendre de vitesse en nous montrant proactifs.

Un président, futur empereur, avait réussi, en prenant les mesures d'hygiène adéquates, à prémunir son pays d'une épidémie de choléra, qui ravageait plusieurs pays d'Afrique.

GBANDI Anatole



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