ANALYSE

Tchad : État fédéral versus État unitaire, les élites régionales interpellées


Alwihda Info | Par Martin Higdé Ndouba - 14 Juin 2023



Face à la centralisation du pouvoir, au détriment de la décentralisation fédérale, on se demande légitimement où se trouvent les élites des différentes régions du Tchad.

Comment peut-on encore avoir confiance en un système étatique qui, en soixante ans, n'a pas amélioré le quotidien des 23 provinces du pays ? Ces interrogations sont un rappel à l'ordre nécessaire. En effet, le développement d'une région repose en grande partie sur ses élites.

Comme le dit si bien un proverbe populaire, « la charité bien ordonnée commence par soi-même ». Malheureusement, peu d'élites s'investissent réellement dans le développement de leur région d'origine. Comment expliquer que moins d'un quart de la population, estimée à 18,03 millions d'habitants, ne bénéficie pas des ressources de sa propre région ?

L'or de Kouri-Bougoudi, le ciment de Mayo Kebbi Ouest et le pétrole de Doba sont-ils exploités au profit de qui ? Pourtant, les préoccupations principales des élites des différentes provinces semblent être l'obtention de postes de responsabilité en milieu urbain et la jouissance de tous les conforts.

Pendant ce temps, leurs régions d'origine souffrent du manque d'eau, d'électricité, de centres de santé, de routes et d'écoles. Quelle hypocrisie ! Ne dit-on pas que le malheur des uns fait le bonheur des autres ? Quel est le crime d'Abéché, dans la province du Ouaddaï, où l'eau potable est une denrée rare ? Il y a tant d'autres exemples.

C'est pourquoi la question d'un État fédéral est une option pour mettre à l'épreuve les élites des différentes régions du pays. Malheureusement, les assoiffés du pouvoir ont imposé le projet d'un État unitaire décentralisé, afin de maintenir le même système qui a échoué dans tous les domaines.

Quoi qu'ils en disent, cette forme d'État centralisé risque de faire reculer le Tchad de 32 ans. Il ne faut pas confondre la forme d'un État fédéral avec un esprit de régionalisme. C'est plutôt un moyen d'encourager les natifs de chaque région à contribuer au développement de leur localité.

C'est aussi une réponse à la lutte contre les nominations basées sur des liens familiaux, des amitiés ou des affiliations politiques. En réalité, si les richesses de toutes les régions étaient exploitées légalement au profit des localités, on ne parlerait pas de retard de développement dans certaines zones du pays.

Malheureusement, les enfants des différentes régions du Tchad sont complices de la souffrance de leur propre localité. Ils ont vendu leurs compétences au profit d'une politique personnelle. Cependant, cette forme d'État n'est pas sans conséquences.

Plusieurs enquêtes ont montré que la majorité des Tchadiens sont en faveur d'un État fédéral. Imposer un État centralisé ne fait qu'attiser les flammes. Face à la génération actuelle, on risque de regretter ce choix. Les indicateurs de développement du pays sont déjà tous au rouge.

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