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AFRIQUE

Tchad : Le sort des réfugiés du Darfour reste très précaire


Alwihda Info | Par Djamil @ - 16 Mars 2009


Voilà un peu plus de cinq ans qu'Adam Mahamat Ahmed a fui son village du Darfour, dans l'ouest du Soudan, pour échapper aux attaques des milices soutenues par le régime de Khartoum. Cinq ans que ce jeune homme de 19 ans a échoué à une centaine de kilomètres de son Soudan natal, de l'autre côté de la frontière, au camp de Djabal, au Tchad.


Les soldats de l'Eufor ont troqué leurs bérets contre ceux de l'ONU lors d'une cérémonie à Abéché, dans l'est du Tchad, dimanche 15 mars.
Les soldats de l'Eufor ont troqué leurs bérets contre ceux de l'ONU lors d'une cérémonie à Abéché, dans l'est du Tchad, dimanche 15 mars.
Voilà un peu plus de cinq ans qu'Adam Mahamat Ahmed a fui son village du Darfour, dans l'ouest du Soudan, pour échapper aux attaques des milices soutenues par le régime de Khartoum. Cinq ans que ce jeune homme de 19 ans a échoué à une centaine de kilomètres de son Soudan natal, de l'autre côté de la frontière, au camp de Djabal, au Tchad.

Les quatre travailleurs humanitaires de l'ONG Médecins sans frontières (MSF) enlevés, mercredi 11 mars au Darfour, dans l'ouest du Soudan, ont été libérés samedi par leurs ravisseurs. Il s'agit d'un Français, d'un Italien, d'une Canadienne, et d'un Soudanais dont la libération avait été auparavant annoncée par erreur. Le groupe a été libéré sans violence, et aucune rançon n'a été versée, ont affirmé des responsables de MSF et le gouverneur de la province du Darfour-Nord, Yousif Kibir. Selon ce dernier, l'enlèvement des humanitaires est l'oeuvre d'un groupe inconnu, "Les aigles de Bachir" - du nom du chef de l'Etat soudanais, Omar Al-Bachir, qui fait l'objet d'un mandat d'arrêt délivré, début mars, par la Cour pénale internationale pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité. "L'enlèvement était une réponse à la mesure prise contre la souveraineté de la nation", a ajouté le gouverneur. - (AFP.)
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Il y survit aux côtés de 16 000 réfugiés darfouris, à quelques minutes de piste du gros bourg de Goz Beïda, dans l'est du pays. Progressivement, les toits de chaume des cases ont remplacé les bâches fournies par le Haut-Commissariat aux réfugiés (HCR) durant les vagues d'exode de 2003-2004. Les installations provisoires s'installent dans la durée.

"Les conditions de sécurité se sont améliorées, les femmes se font moins agresser quand elles vont chercher du bois, mais ici je ne suis pas chez moi. Il n'y a pas d'école secondaire, rien à faire. Ce que je veux c'est retourner sur la terre de mes aïeux", confie Adam. "Mais, ajoute-t-il, je ne rentrerai que lorsque Bachir ne sera plus au pouvoir."

Le nom d'Omar Al-Bachir, le président soudanais, s'étale sur des pancartes du camp de Djabal : "Justice pour le génocide au Darfour ; Bachir en prison". Le chef de l'Etat soudanais a été inculpé, le 4 mars, par la Cour pénale internationale (CPI) pour les crimes commis au Darfour où, selon l'ONU, 300 000 personnes auraient été tuées depuis six ans.

Du coup, Adam adore la CPI. Pourtant, "nul ne peut dire si cette inculpation finira par faire tomber le régime ou si Khartoum va à nouveau mettre le Darfour à feu et à sang et relancer des flots de réfugiés sur les pistes", s'inquiète Serge Malé, le "M. HCR" au Tchad.

Actuellement, le pays compte environ 250 000 réfugiés répartis dans douze camps auxquels s'ajoutent 180 000 Tchadiens déplacés par les combats.

Depuis l'inculpation du président Bachir, les organisations humanitaires présentes au Tchad se préparent au pire. Elles ont refait leurs stocks alimentaires, préparé leur logistique.

"Le mandat contre le chef de l'Etat soudanais est une bonne chose pour la justice internationale mais il fait planer bien des incertitudes sur la région", concède le ministre des affaires étrangères français, Bernard Kouchner, en visite au Tchad les 14 et 15 mars. De source militaire à N'Djamena, les rebelles tchadiens soutenus par Khartoum auraient en effet concentré 500 véhicules de l'autre côté de la frontière. Ils se prépareraient à une offensive sur la capitale tchadienne avant le début de la saison des pluies, fin mai, selon les militaires tchadiens qui se rappellent cette cavalcade motorisée qui faillit emporter le président Idriss Déby en février 2008.

Certes, aujourd'hui, l'armée tchadienne a massé des troupes - 25 000 hommes, dit-on - sur la frontière. Elle s'est dotée d'hélicoptères et d'avions de combat pilotés par des Ukrainiens. Mais personne ne parierait sur la fidélité absolue des soldats tchadiens envers leur commandant en chef, ni sur les intentions d'Omar Al-Bachir dont les relations avec N'Djamena sont notoirement exécrables.

Cette instabilité n'est pas nouvelle. Elle avait même conduit la communauté internationale à déployer des troupes dans l'est du Tchad en 2008. Selon le mandat du conseil de sécurité de l'ONU de septembre 2007, cette force est destinée à protéger les camps de réfugiés. Pas le régime d'Idriss Déby contre les rebelles, ni pour surveiller les 3 000 km de frontières avec le Soudan. Pas plus qu'elle n'est impliquée dans la recherche d'une solution politique à la crise. "Le déploiement militaire ne règle pas le conflit, reconnaît M. Kouchner, mais il a eu un effet dissuasif sur les rebelles."

Qu'en sera-t-il demain alors que cette force internationale vit un moment délicat dans un environnement tendu ? Dimanche, en effet, la force européenne Eufor, déployée depuis un an, a cédé la place à la Mission des Nations unies en république centrafricaine et au Tchad (Minurcat), en attendant que la lourde machine onusienne se mette en marche et prenne le relais.

Le contingent de l'ONU, plus internationalisé, perdra peut-être en cohésion, mais, en échange, il a été musclé, passant des 3 400 hommes de l'Eufor (Français pour la moitié d'entre eux) à 5 200, répartis sur un territoire grand comme la moitié de la France. Pour assurer la transition, le départ du contingent de l'Eufor sera échelonné sur plusieurs mois.

A l'issue du mandat de l'Eufor, le ministre Kouchner parle de "succès". Certes, il défend "sa" mission dont il avait arraché le déploiement contre l'opposition initiale des Anglais et des Allemands, guère pressés de se joindre à une intervention promue par les Français dans leur pré carré africain.

"L'Eufor a eu incontestablement un effet dissuasif", admet Roland Van Hauwermeiren, le responsable Tchad pour l'ONG Oxfam. "Mais on ne peut pas parler de succès lorsque le niveau de criminalité augmente, que les rebelles continuent de recruter de jeunes soldats dans les camps, que les forces en présence se massent de part et d'autre de la frontière et que les conditions de retour des réfugiés ne sont pas réunies", ajoute-t-il.

Mais tant que les protagonistes (rebelles tchadiens et soudanais et les régimes qu'ils affrontent) ne feront pas preuve d'une volonté de régler politiquement cette crise multidimensionnelle, Adam n'est pas près de quitter le camp de Djabal.



Pour toute information, contactez-nous au : +(235) 99267667 ; 62883277 ; 66267667 (Bureau N'Djamena)