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POINT DE VUE

Trois mesures visant à favoriser des économies post-COVID-19 plus résilientes et inclusives


Alwihda Info | Par Rodger Voorhies - 12 Avril 2021



Rodger Voorhies, Président de la division "Global Growth & Opportunity" de la Fondation Bill et Melinda Gates.

Rodger Voorhies, Président de la division "Global Growth & Opportunity" de la Fondation Bill et Melinda Gates.
Rodger Voorhies, Président de la division "Global Growth & Opportunity" de la Fondation Bill et Melinda Gates.
Depuis que la COVID-19 a frappé le monde, les économies africaines ont connu un ralentissement dramatique. Même les pays où le taux d’incidence initiale du virus était limité ont dû faire face à de graves répercussions économiques. Les perturbations importantes des marchés agricoles et la flambée du chômage en Afrique subsaharienne ont réduit les revenus et entraîné une aggravation de l’insécurité alimentaire pour beaucoup de personnes.

S’assurer que l’aide financière d’urgence puisse atteindre rapidement les populations est devenu une priorité pour de nombreux pays, mais avec les confinements et la distanciation sociale, il n’était plus possible de recourir aux moyens traditionnels de distribution de l’aide. Les pays qui avaient investi dans leurs systèmes financiers pour les rendre plus inclusifs avant la pandémie ont pu atténuer les graves conséquences de ces chocs économiques pour les ménages.

Ces pays n’ont pas eu besoin de se réinventer radicalement pour pouvoir agir, mais ils ont utilisé de manière efficace des solutions établies propices à la numérisation, la croissance et l’inclusion. Il y a, bien entendu, une limite à la capacité des pays à élargir l’accès aux services financiers en période de crise. Il est donc temps de mettre à jour les réglementations et les infrastructures financières pour favoriser l’inclusion.

Alors que les dirigeants africains et mondiaux chercheront à mettre en œuvre les mesures que les pays peuvent prendre pour reconstruire leurs économies après la pandémie, à la suite de leurs discussions lors des réunions de printemps de la Banque mondiale et du FMI la semaine dernière, ils n’auront pas besoin de réinventer la roue. Voici trois suggestions sur la manière dont les pays peuvent rendre leurs économies plus résistantes aux futures crises, notamment au changement climatique, aux catastrophes naturelles et à la prochaine pandémie.

Tout d’abord, les pays doivent élaborer des réglementations en matière de services financiers qui offrent aux entreprises et à l’industrie un espace pour innover, tout en protégeant les consommateurs contre les risques, notamment en ce qui concerne la confidentialité des données et la cybersécurité. Lorsque les pays adoptent les réglementations financières appropriées, il est possible de multiplier les avantages de l’inclusion financière en un rien de temps.

Par exemple, les paiements mobiles au Ghana ont triplé entre 2014 et 2017, tandis que l’accès général aux comptes bancaires est passé de 41 % à 58 %. Le catalyseur de cette croissance remarquable a été l’introduction par la Banque du Ghana d’une nouvelle réglementation sur la monnaie électronique en 2015, qui a permis à des établissements non bancaires, comme les opérateurs mobiles, de posséder et de gérer des entreprises de paiement mobile, tout en simplifiant le processus pour les consommateurs qui ouvrent des comptes d’entrée de gamme. Ces réformes montrent comment les banques centrales peuvent étendre rapidement l’accès aux services financiers, tout en maintenant des systèmes sûrs et efficaces.

Mais la modernisation de la réglementation en matière de services financiers n’est qu’une partie de la solution. Les gouvernements doivent accroître leur capacité à identifier les citoyens et à effectuer des transactions avec eux de manière sûre et rapide. La deuxième mesure que les gouvernements devraient prendre pour reconstruire leurs systèmes financiers et bâtir des économies plus résilientes consiste à investir dans des infrastructures inclusives de paiement numérique et d’identification.

Pendant la pandémie de la COVID-19, les pays disposant d’un niveau élevé de connectivité en matière de paiement et d’identification ont pu rapidement identifier et effectuer des paiements aux ménages pouvant bénéficier de fonds d’urgence. Grâce aux systèmes de paiement et d’identification numériques, les individus n’ont plus besoin de remplir des formulaires papier ou de faire la queue dans les files d’attente pour recevoir des fonds d’urgence ; ils peuvent faire leur demande en ligne ou par SMS et être payés de manière numérique. En Namibie, où le taux d’adoption de l’identification est élevé et où la réglementation sur la monnaie électronique est favorable, les travailleurs non déclarés pouvaient demander une assistance par SMS ; les candidats retenus recevaient alors un jeton de portefeuille électronique qu’ils pouvaient retirer à un guichet automatique ou utiliser pour des transactions numériques. En trois semaines, le gouvernement a distribué de l’argent par voie numérique à plus d’un tiers des adultes en âge de travailler.
 
À l’opposé, les pays dont la connectivité des paiements et les systèmes d’identification étaient limités disposaient d’options moins efficaces. Certains gouvernements ont dû donner physiquement de l’argent, tandis que d’autres se sont appuyés sur des mesures de protection sociale, telles que la subvention du prix des produits alimentaires ou du carburant.

Heureusement, les gouvernements qui cherchent à moderniser leurs systèmes financiers numériques n’ont pas besoin de partir de zéro. Ils peuvent utiliser de nouvelles plates-formes de paiement et d’identification open source, telles que Mojaloop et MOSIP, qui s’appuient sur les meilleurs cadres de confidentialité, de protection des données et de cybersécurité. Ces innovations accélèrent déjà l’inclusion financière numérique dans plusieurs pays. L’Éthiopie et la Guinée explorent des projets pilotes basés sur la plate-forme MOSIP.

Une troisième mesure que les gouvernements peuvent prendre pour construire des économies plus résilientes consiste à mettre les femmes au premier plan. De plus en plus d’expériences démontrent que mettre de l’argent entre les mains des femmes pour les connecter au système financier moderne peut conduire à des avantages à long terme, y compris un plus grand pouvoir de décision dans leur famille, et une plus grande sécurité économique.

Grâce à des systèmes de paiement d’urgence ciblés, rendus possibles par des systèmes financiers numériques solides et inclusifs, les gouvernements ont soutenu l’activité économique et les femmes pendant la pandémie. Au Togo, le gouvernement a mis en place le système de transfert d’argent NOVISSI pour soutenir les citoyens les plus vulnérables, dont les revenus quotidiens ont été bouleversés par la pandémie. Grâce à ce programme, plus de 370 0001 femmes au Togo ont reçu une aide financière entre avril et juin 2020.

Il faudra du temps pour apprécier pleinement les résultats des mesures d’intervention rapide prises par les gouvernements pour atténuer l’impact économique de la pandémie. Il est clair, cependant, qu’au cours de l’année dernière, les gouvernements ont préservé des millions de vies et de moyens de subsistance grâce à une utilisation judicieuse de l’infrastructure financière numérique inclusive.2

Au sortir de la pandémie, les gouvernements ont l’occasion de tirer des enseignements de cette crise pour mettre en place des systèmes financiers inclusifs dont ils auront besoin pour faire face aux futures crises économiques. Ce faisant, ils peuvent également positionner leurs économies en faveur de la croissance et de la résilience en ce siècle numérique.



Pour toute information, contactez-nous au : +(235) 99267667 ; 62883277 ; 66267667 (Bureau N'Djamena)