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AFRIQUE

Ebola, histoire d’une solidarité africaine


Alwihda Info | Par Adji Zamtato - 1 Novembre 2014



Ebola, histoire d’une solidarité africaine
“Si l’homme le plus rapide du monde est un noir, c’est parce que l’Afrique court à sa perte“, cette phrase de Gandhi Djuna (hélas) m’a semblé dénuer de tout sens. Mais au regard de la propagation de l’épidémie à virus Ebola en Afrique de l’Ouest, je me demande si au bout du compte ce n’est pas vrai.
Le virus Ebola a fait sa première apparition en Guinée Conakry en Décembre 2013 avec comme épicentre la région forestière frontalière entre la Guinée, le Libéria et la Sierra Leone. La transmission se faisait principalement d’humain à humain, lors de contacts avec des malades ou des personnes mortes d’Ebola. Epidémie méconnue jusqu’à lors par les ressortissants de l’Afrique de l’Ouest, elle n’a pas suscité plus d’inquiétude qu’elle n’en devait. La négligence qui a prévalu aux premières heures de l’épidémie étant symptomatique du comportement de certains africains a eu pour conséquence les résultats les plus catastrophiques (près de 5,000 victimes en Octobre 2014) enregistrés depuis la découverte du virus en 1976.

Et l’Union Africaine…

La réaction de l’Union Africaine (UA) face à cette épidémie qui touchait en même temps trois de ses membres est intervenue pour la première fois en Avril 2014 lors de la réunion entre les Ministres de la Santé des pays africains et l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) à Luanda, en Angola. N’ayant pas saisie non plus l’ampleur de l’épidémie, l’UA s’est donné le temps de ‘’réfléchir à tête reposée’’ aux solutions possibles alors que le virus faisait déjà des victimes par centaine.
Le Conseil de Paix et de Sécurité de l’UA s’est réuni le 19 Août 2014 lors de la 450ème session à Addis Abeba et a déclaré le virus comme étant une menace à la paix et à la sécurité du continent. L’intention de réagir était louable car il était question de déployer les forces armées de l’UA et d’envoyer sur place des médecins, du personnel de santé et des spécialistes de maladies infectieuses. L’intention était bonne. A cette date le virus avait déjà fait plus de 2000 morts et la vitesse de propagation exponentielle de l’épidémie a contraint certains pays africains à fermer, à juste titre, leurs frontières avec les pays où le virus avait été signalé.
Le 08 Septembre dernier lors de la réunion d’urgence du Conseil Exécutif de l’UA, la Commission de l’UA a demandé aux pays ayant fermé leur frontière de lever les restrictions de voyages qui visaient les pays infectés par le virus afin de permettre la libre circulation des biens et des personnes. Des mesures fortement influencées par les recommandations de l’OMS pour éviter l’asphyxie des pays concernés.
De toutes les mesures qui auraient pu être prises pour attaquer frontalement l’épidémie, l’UA demande plutôt l’ouverture des frontières. Nul n’est sans ignoré le mode de contamination de la maladie et une telle mesure dans des circonstances pareilles me semble bien inappropriée, pour le bon sens et à mon humble avis.

…Une institution fantôme

A quoi devait-on s’attendre après avoir vu le rôle quasi inexistant de l’UA dans la crise Libyenne, la crise malienne ou le conflit centrafricain ? L’inertie et la nonchalance avec laquelle l’Union Africaine gère cette crise épidémiologique ne fait que s’inscrire dans la continuité de son rôle secondaire sur un continent où elle était censée être en première ligne de toutes les crises sanitaires ou sécuritaires et en prendre les décisions qui s’imposeraient.
Comment est-il possible qu’une ‘’institution internationale’’ de cette envergure n’ait que si peu d’influence sur son continent? Eh bien, le fait est que l’UA est comme l’oncle pauvre de la famille. Les caisses de l’UA sont presque vides, ce qui limite évidemment son influence face à des interlocuteurs blindés comme l’Union Européenne, la mère France ou les Etats-Unis d’Amérique. Ces principaux pourvoyeurs de fonds discutent directement des mesures à mettre en œuvre avec les pays infectés par le virus, tout en ayant la politesse d’inviter l’UA pour leur information. Les besoins financiers nécessaires pour endiguer l’épidémie évoluent au fur et à mesure du rythme de contamination. Des âmes charitables promettent ça et là des millions d’Euros au continent au grand dam des pays ‘’Africains’’.
En fait, la pauvreté de l’Union Africaine, tout comme celle du continent qui l’abrite, provient du fait que ses membres ne participent plus aux cotisations annuelles. Mouammar Kadhafi qui prenait à son compte (ou celui de la Libye) la cotisation des brebis galeuses n’étant plus, l’UA n’a plus que ses yeux pour pleurer. Et même si la majorité des présidents en Afrique sont milliardaires, aucun ne semble prêt à remplacer le ‘’Panafricaniste’’ Kadhafi (PF).

Comment l’Union Africaine devrait-elle agir ?

La propagation de l’épidémie à virus Ebola est imputable au manque de communication sur la virulence de la maladie et la prise en charge des personnes infectées. La maladie se propageant à une vitesse exponentielle, le nombre de personnel de santé restant invariant ou se réduisant suite au décès de médecins et infirmiers infectés, une stratégie plus adaptée aurait dû être prise pour pallier à ce problème. Hélas cela n’a pas été fait comme il se devait.
La réaction face au virus Ebola devait être la même que celle qui avait prévalu lors de l’envahissement du Mali par les islamistes radicaux ou terroristes (peu importe) en 2013. Alors que les pays de la CEDEAO discutaient des modalités d’envoie des troupes, le président tchadien Idriss Deby avait envoyé près de deux milles hommes sur le terrain combattre les islamistes. Les autres forces armées ouest africaines et français rejoignirent le Tchad bien plus tard.
Si la menace à la sécurité est autant prise au sérieux, la menace à la santé devrait l’être davantage car il y va de la santé de la population.
Le continent africain est en guerre, non pas contre des terroristes mais contre une maladie. Tel que le Tchad s’est dépêché à envoyer des troupes combattre les terroristes au Mali, autant les pays africains qui disposent de nombreux médecins et infirmiers militaires devraient les envoyer combattre ce virus. La sécurité sanitaire du continent africain est en jeu et c’est ici qu’on devrait sentir la solidarité des pays de l’Afrique de l’Est, Australe, Centrale et du Nord avec l’Afrique de l’Ouest. Il ne s’agit plus de combat armé entre troupes mais de combat intellectuel, médical, épidémiologique et stratégique. C’est autant un défi pour les armées africaines de prouver qu’elles savent faire autre chose que le maintien de la paix ou de tirer sur des civils.
L’Union Africaine devrait exiger de chacun de ces pays membres d’envoyer du personnel de santé militaire au nom de la solidarité africaine, au lieu de proposer des mesures inadéquates qui aggraveront davantage la situation sanitaire. Il y va de la légitimité de l’Union Africaine et de sa crédibilité sur l’échiquier international. Même si elle n’a pas les moyens financiers nécessaires, elle devrait au moins définir clairement la meilleure stratégie pour contenir et éradiquer le virus et ensuite faire appel au donateur, et non le contraire.



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