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TCHAD

Lettre ouverte aux parlementaires et sénateurs français et européens


Alwihda Info | Par - Җ€BIЯ - - 4 Février 2008


Face à cette situation dramatique que connaît le pays depuis des décennies, des choix audacieux sont plus que jamais indispensables et urgents si l’on veut renouer avec les espoirs et aspirations du peuple tchadien meurtri. L’enjeu est de taille. Comment imaginer que l’on puisse laisser des millions d’êtres humains dans la désolation avec un Etat plus que jamais en voie d’écroulement ?


Mesdames, Messieurs,
Citoyen Tchadien, je me permets d’attirer votre attention sur la crise politique qui endeuille les familles tchadiennes.
La politique menée par le dictateur Idriss Deby, pilier du néocolonialisme français, provoque une révolte massive au sein de la population. Après avoir refusé d’envoyer une délégation pour discuter des modalités pratiques de l’application de l’accord de Syrte du 25 octobre 2007 paraphé par les quatre principales oppositions politico-militaires, ce dernier a continué de détruire le pays en lançant une vaste et violente offensive contre les forces de l’opposition politico-militaire mettant ainsi fin à la trêve observée jusque là, scrupuleusement, par les différents mouvements rebelles.

Il n’en faut pas plus pour que M. Sarkozy et son gouvernement apportent leur soutien à M. Deby par leurs déclarations complaisantes et surtout par un important appui militaire. Rappelons que la France maintient au Tchad 1200 hommes en permanence et plusieurs avions de combats. Cette force a pour but de soutenir les intérêts économiques et géostratégiques de la classe dominante française. Cela se traduit par le soutien, sans retenue, à un dictateur qui refuse toute avancée démocratique, qui change à sa guise la constitution de la République pour se maintenir perpétuellement à la tête d’un pouvoir qui massacre son opposition, qui maintient son peuple dans la misère et la désolation. Cet Etat est pourtant riche en ressources pétrolières, mais M. Deby sauvegarde et fait fructifier les intérêts de son clan et de ses alliés.

Le Quai d’Orsay, après avoir exprimé la nécessité du déploiement des forces européennes dans la région, reconnaît que les forces françaises soutiennent l’armée de M. Deby en matière de logistique et de renseignement. Il admet par ailleurs que ses avions survolent quotidiennement la position des rebelles en vue de communiquer des renseignements aux milices de M. Deby. Nous rappelons qu’en avril 2006, lorsque la rébellion du FUC avait atteint les limites de la capitale où se sont déroulés des combats extrêmement violents, l’armée française avait alors soutenu, sans détour, le régime tyrannique de N’djamena. Il ne fait aucun doute que l’on assiste aujourd’hui, pour la énième fois, à une intervention militaire française dont le Quai d’Orsay est coutumier pour défendre ses alliés dictateurs. Cette intervention va à l’encontre du droit du peuple tchadien à s’autodéterminer et à s’émanciper de la dictature de M. Deby et des multinationales de tout poil et toutes les forces de la résistance nationale récusent cette intervention illégitime de la France. Les forces politico-militaires ont unanimement et ostentatoirement demandé aux troupes françaises d’observer la neutralité axiologique dans la guerre les opposant aux milices de M. Deby.

Pour justifier son intervention dans le conflit armé tchado-tchadien, le gouvernement français ne cesse de mettre en avant l’application des accords de coopération militaire entre le Tchad et la France. Selon la partie tchadienne signataire desdits accords de 1976, ces textes n’autorisent nullement une telle éventualité et l’opération de renseignement pratiquée par l’armée française au Tchad constitue un engagement militaire aux côtés des éléments du gouvernement tyrannique de N’djamena. Aujourd’hui on peut aisément penser que la mission Epervier au Tchad combat illégalement les forces de la résistance nationale. Cette immixtion militaire abjecte relève d’une décision purement politique dénuée de fondements juridiques. C’est une pratique de banditisme néocolonial dont la Franceafrique est coutumière. De plus, le Quai d’Orsay cherche actuellement à entraîner l’Europe dans cette aventure macabre. En effet, sous la couverture de l’Eufor -qui seront déployées selon son porte parole le mercredi 06 février- les autorités militaires françaises cherche à faire jouer à la France, au Tchad et en Centrafrique et demain dans d’autres régions du monde, un rôle semblable à celui de M. Bush au Moyen Orient. Quand on sait que l’essentiel des forces de l’Eufor seront fournies par la France, il s’agira d’entraîner l’Europe dans une aventure macabre et baisser son drapeau désormais couvert honteusement du sang des tchadiens, et de hisser à la place celui de l’Eufor.

Face à cette situation dramatique que connaît le pays depuis des décennies, des choix audacieux sont plus que jamais indispensables et urgents si l’on veut renouer avec les espoirs et aspirations du peuple tchadien meurtri. L’enjeu est de taille. Comment imaginer que l’on puisse laisser des millions d’êtres humains dans la désolation avec un Etat plus que jamais en voie d’écroulement ?

Pour autant que le régime de M. Deby refuse et fait obstruction à la démocratie et à un Etat de droit, il affrontera perpétuellement des résistants. Seul M. Deby et ses acolytes extérieurs endosseront l’entière responsabilité des massacres et des torts infligés au peuple tchadien. Aux dernières nouvelles, on apprend la participation active des rebelles du Mouvement pour la Justice et l’Egalité dans ces guerres. Le rafle de jeunes tchadiens est monnaie courante et le pays s’enfonce progressivement dans des ténèbres sans précèdent. Les familles tchadiennes sont endeuillées. Cet état de fait est intenable et en qualité de citoyen tchadien je vous demande d’aider le Tchad à trouver une voie de sortie digne et honorable.

Pour éviter de participer à un génocide et en payer le prix demain, la France doit cesser effectivement tout soutien militaire au régime de M. Déby qui opprime son peuple, fustige les formations politiques de l’intérieur et la société civile, refuse le dialogue sincère tant attendu par les Tchadiens et viole gravement les règles internationales. Lors du sommet Afrique-UE de Lisbonne Nicolas Sarkozy a martelé ceci : « Nous n'avons pas toujours su prévenir ou arrêter des drames innommables. Je pense au Rwanda et à son génocide qui nous oblige à réfléchir, France comprise, à nos faiblesses ou nos erreurs ». Le mutisme et l’immobilisme politique pourraient conduire sans conteste le Tchad et notre humanité toute entière dans des drames humains atroces. Avant que le pays ne sombre davantage dans une irrémédiable tragédie, je vous saurais gré, Mesdames et Messieurs, d’inscrire dans l’agenda de votre auguste Assemblée la question de l’ingérence de la France dans les conflits inter-tchadiens.

Aujourd’hui, les Tchadiens souhaitent la tenue d’un forum national réunissant toutes les forces vives de la Nation duquel sortiront de véritables propositions pour la mise en place d’une réelle transition qui permettra au gouvernement de mettre en place un Etat de droit, seule garantie pour la tenue d’élections libres et transparentes. C’est de cette façon et seulement par cette voie que le peuple tchadien et français sortiront grandis et auront beaucoup à gagner avec l’instauration d’une paix durable. L’heure est venue de commencer à créer les conditions de ce Tchad paisible et la France peut certainement beaucoup y contribuer.

Espérant de tout cœur que vous serez sensibles à ma sollicitation et dans l’attente d’une réaction de votre part, je vous prie d’agréer, Mesdames, Messieurs, mes cordiales salutations.

Adoum DJIBRINE HAROUN
[email protected]



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