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ANALYSE

Tchad : le retour de la paix au Ouaddaï géographique, c'est pour bientôt ?


Alwihda Info | Par Hamid Mahamat Issa - 29 Août 2019



Illustration. Danses traditionnelles au domicile du sultan du Ouaddaï, au quartier Goz Amir d'Abéché. © Alwihda Info/H.C.T
Illustration. Danses traditionnelles au domicile du sultan du Ouaddaï, au quartier Goz Amir d'Abéché. © Alwihda Info/H.C.T
Depuis quelques années, les régions de Sila et du Ouaddaï connaissent un regain de violences extrêmement meurtrières qui mettent aux prises les différentes communautés arabes, maba, dadjo et mouro. La permanence de ces conflits intercommunautaires commence, au fil des années, à remettre en cause la politique du gouvernement tchadien à pouvoir juguler ces tensions sociales et à instaurer un climat de paix durable entre les populations. Pour redorer son image et tenter de rétablir définitivement la paix et la sécurité dans ces deux régions, le chef de l'État Idriss Deby Itno a pris des mesures plus que jamais fortes parmi lesquelles l'instauration de l'état d'urgence et le déploiement des forces militaires, chargées de sécuriser les populations, surtout dans les zones de transhumance, principaux foyers de tension entre éleveurs transhumants et agriculteurs autochtones mais aussi entre éleveurs-agriculteurs sédentaires et éleveurs-agriculteurs autochtones. 

L'état d'urgence et les mesures qui l'accompagnent vont-ils conduire au retour définitif de la paix dans le Ouaddaï et le Sila ?

En tant qu'observateur de la scène politique tchadienne et vivant dans cette partie du pays, je dois me permettre de répondre par l'affirmative et cela pour plusieurs raisons : d'abord, cet espoir de paix s'explique en grande partie par la volonté affichée du chef de l'État qui semble être clairement déterminé à en finir avec ces conflits récurrents qui, il faut le dire, sont en train de remettre en cause la politique du gouvernement à pouvoir instaurer la paix et la sécurité dans ces régions hautement sensibles, vu le partage des frontières que le Tchad a, avec le Soudan.

Deuxième raison et non des moindres, c'est le déploiement musclé des forces militaires dans le Ouaddaï et le Sila, une stratégie qui en dit beaucoup puisque c'est pour la première fois qu'une force de telle envergure est envoyée sur un terrain en interne. Ce contingent militaire de 5000 hommes sera réparti dans les trois provinces dont le plus important est celui du Ouaddaï et de Sila où le déploiement a commencé à se matérialiser avec l'arrivée des premières troupes sur le terrain, chose inédite jusqu'ici.

Autre raison d'y croire au retour de la paix, c'est le rapprochement du nouveau Sultanat du Ouaddaï avec le régime de Déby : la proximité de la Première Dame avec le nouveau sultan, Sa Majesté Chérif Abdelhadi Mahdi qui n'est autre qu'un de ses proches parents, peut forcément contribuer à changer la donne. Alors, le retour prochain de la paix et la sécurisation du Ouaddaï géographique s'annonce comme un défi majeur pour le couple présidentiel, histoire de justifier et légitimer la révocation de l'ex-sultan Mahamat Ourada II dont la principale cause de son éjection est, du moins officiellement, son "laxisme avéré et complaisance à outrance dans la gestion des affaires du Sultanat, laissant ainsi s'instaurer un désordre total engendrant confrontation meurtrière entre communautés". C'est pourquoi, il faut à tout prix mettre fin à ces conflits intercommunautaires dans le Ouaddaï géographique. 

Enfin, l'instabilité des pays comme le Soudan, la Libye ou encore la RCA amène le chef de l'État à se soucier de ses propres frontières qui deviennent de plus en plus poreuses. Aujourd'hui, les trafics d'armes à feu sont devenus monnaie courante dans presque toutes les villes du Nord-est et Sud-est du pays. Il y a donc "urgence" pour le président de la République Idriss Déby Itno à revoir sa carte, désarmer et pacifier ces régions pour éviter de courir le risque d'une éventuelle "somalisation" du Nord-est du Tchad. 

Hamid Mahamat Issa, professeur d'histoire au Lycée National Franco-arabe d'Abeché.



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