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ANALYSE

Allons-nous vers l’application de la charia au Cameroun ?


Alwihda Info | Par Erick-Achille Nko’o - 30 Novembre 2013



Erick-Achille Nko’o
Erick-Achille Nko’o
La dépravation des mœurs au Cameroun et surtout aussi les violes dont les femmes sont de plus en plus victimes, ont amené la ministre de la promotion de la femme et de la famille à prendre un certain nombre de résolutions visant à sécuriser davantage la femme noyau par essence de la famille. Ces résolutions portent essentiellement sur l’habillement de la jeune fille qui a perdu de toute sa convenance. Il suffit de voir les tenues qu’arborent les jeunes au Cameroun pour comprendre le niveau de perversité de la société camerounaise toute entière. Aujourd’hui plus que jamais, les pouvoirs publics affirment la ferme volonté d’assainir les mœurs et d’arrimer les camerounais à une remarquable discipline vestimentaire. Une décision diversement accueillie et d’ailleurs rejetée par la file des prostituées camerounaise. Qui a dit qu’il ne faut pas oser changer les mentalités ?

Au Cameroun comme ailleurs, certains choix vestimentaires font l’objet de vives critiques et contradictions. Dans d’autres pays plus encrés dans leurs cultures et traditions, ces choix vestimentaires entraînent par moments pour de nombreuses femmes, le risque de poursuites judiciaires ou même d’être fouettées. On se souvient qu’il y a quelques années, une jeune journaliste soudanaise avait copieusement été fouettée pour avoir arboré une tenue estimée indécente par les autorités soudanaises. La vidéo où les forces de polices la fouettaient avait très vite fait le tour des réseaux sociaux suscitant ainsi un vif débat sur la question. Des Etats ou des groupes djihadistes surveillent systématiquement au nom de la religion ou de la culture, la manière dont les femmes s’habillent comme tel a été le cas au nord du Mali et quelque temps auparavant en Somalie. Où les shebabs avaient instauré la chariat

Une atteinte aux droits de l’homme ?

La liberté de porter une tenue vestimentaire de son choix est un droit. Et cette liberté de choisir sa tenue est importante dans la mesure où elle nous donne non seulement le droit d’exprimer nos convictions personnelles, mais surtout aussi notre identité culturelle. Mais toutefois, l’identité culturelle n’est pas l’apanage d’un individu mais d’un groupe d’individus qui s’accordent sur un certain nombre de valeurs et décident d’en faire la norme qui régule leur société. Autrement dit, c’est la société qui définit ce qui est décent ou pas. Et sans complaisance, le milieu social et ceux qui détiennent l’autorité doivent veiller à ce que les

composantes de la société se comportent conformément aux normes et valeurs sociétales dominantes. D’ailleurs le rôle des pouvoirs publics est de sécuriser les hommes et les biens. Il faut donc sécuriser la femme par de dé-vêtements décents.

Contrairement à ce que beaucoup pensent, la conformation de la tenue vestimentaire notamment de la femme aux normes morales de la société n’est, en rien, la restriction de ses droits et de ses libertés mais plutôt le rehaussement des valeurs qu’elle incarne et qu’on lui reconnait dans notre environnement. Et surtout pour qu’elle contribue elle-même à barrer la voie aux violes et crimes rituels dont elle est victime au quotidien et qui sans doute fragilisent son bien-être au regard des grossesses non désirées, du VIH\SIDA et tous les maux qui tournent autour du désir sexuel qui nait de telles circonstances

Le Cameroun n’est pas le premier pays au monde où ce débat est lancé. En 2007 la question avait fait surface en Tchétchénie, le président tchétchène Ramzan Kadyrov avait alors encouragé les femmes à être décentes dans leur habillement. Les pays de la péninsule arabe quant à eux restent et demeurent regardant en matière de décence vestimentaire. L’on note d’ailleurs la présence d’un code vestimentaire en Iran. Et même ces pays qui s’érigent en chantres des droits de l’homme ne sont pas en reste de la régulation de la tenue vestimentaire. On se souvient que la France, l’Espagne, la Belgique et plusieurs autres pays ont adopté des lois limitant le type de tenues que les femmes peuvent porter en public. C’est ainsi que le port du voile intégral et pire le tchador sont interdits en Europe. Le voile est-il indécent ? Surement pas plus indécente que l’homosexualité prôner par ces puissances dénudées de toute valeur morale.

La ministre de promotion de la femme et de la famille en faveur de la charia sur le plan vestimentaire?

La décision musclée de la ministre camerounaise de la promotion de la femme et de la famille rappelle d’autres mesures prises par certains pays en matière de protection et de valorisation de la femme ; je pense notamment à l’Iran dont l’Article 21 de la Constitution stipule que: « Le gouvernement doit assurer les droits de la femme à tous égards, conformément aux critères islamiques ». Y compris le droit à un habillement qui convient le mieux aux exigences morales iraniennes. Jalouse de sa laïcité, le Cameroun pour sa part, se fonde dans sa bataille contre l’indécence vestimentaire sur les valeurs morales de la société camerounaise toute entière. La femme sous aucun prétexte ne doit être chiffonnée. Et pour imposer elle-même ce respect, elle se doit de se vêtir de tenues décentes. De tenues qui ne font pas naître ce désir qui entraîne les violences à l’endroit des femmes.

Quelle va être la base d’une tenue décente au Cameroun ?

Appeler la jeunesse à la décence vestimentaire est sans doute une initiative qui tombe à pic dans un contexte où des actes d’immoralité de toute nature sont devenus récurrents. Et sans vouloir lire dans une bulle de cristal, l’on peut se dire qu’après cette phase de sensibilisation lancée par les pouvoirs publics, suivra la phase punitive. Mais toutefois, la question qui brule les lèvres est celle de savoir qu’elle va être la norme vestimentaire puisque, quoiqu’on dise, il

y a quand même une certaine relativité dans le terme “bien habillé “. Par exemple l’Iran pour pallier à cette relativité a définit dans sa constitution le genre de vêtements acceptables par le peuple iranien. Il faut donc une norme vestimentaire pour accompagner les efforts des pouvoirs publics ; mais toutefois va-t-elle faire l’unanimité ?

Erick-Achille Nko’o
Ecrivain et analyste de la géopolitique arabe E-mail : [email protected]
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