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TCHAD

Bokal: "Je suis le boutiquier du quartier, tout le monde paye chez moi, même à crédit"


Alwihda Info | Par Guillaume Djerane - 25 Avril 2022


Rappeur tchadien investi aussi dans la production musicale, Bokal est réalisateur de clip, beatmaker et depuis peu à la tête d'un label de production à Ndjamena. Il est s'est livré dans une interview à Alwihda Info.


Bokal: "Je suis le boutiquier du quartier, tout le monde paye chez moi, même à crédit"
Alwihda Info. Comment peut on te définir? En tant que producteur ou musicien ?

Bokal. Je me vois actuellement comme un mal nécessaire pour un showbiz. Je suis à la base un rappeur qui a décidé de vouer sa vie aux autres. Je me dis souvent que si je ne brille pas à travers mon rap, je veillerai à travers celui des autres.

Quel est ton instrument préféré ?

Comme tout beatmaker, le piano. Car c'est l'ami fidèle et mon compagnon de tous les jours.

Quelle est votre actualité aujourd'hui ?

Actuellement je me concentre sur mon label et mon album car je pense qu'il est temps que ma vision showbiz soit mise en pratique à travers mon projet, pour que les plus jeunes comprennent mon discours et prennent exemple sur moi.

A quel niveau te situes-tu dans ta carrière de producteur ?

Moi je pense que ma carrière de producteur est à peine à ses débuts. Malgré mon expérience, je pense que j'ai encore beaucoup à apprendre car le milieu n'est pas statique. Il change tout le temps, en plus le Tchad est particulièrement difficile à cerner, donc je suis encore en train d'étudier.

Quel est l'obstacle au showbiz musical au Tchad à ton avis ?

L'obstacle du showbiz musical tchadien est l'ignorance. Je m'explique, on ne peut pas copier un système d'ailleurs et mettre en pratique au Tchad car les contextes sont largement différents. De plus la musique professionnelle coûte extrêmement chère. Tant que tu ne le comprends pas, tu ne peux pas évoluer dans ta carrière. Si vous regardez dans tous les pays du monde, très peu d'artistes ont vu leur succès venir de l'extérieur. Le marché local est une aubaine pour les artistes, malheureusement ils pensent très tôt à l'extérieur. Il est plus facile de vendre ta musique où l'on te connais car même si on n'apprécie pas ta musique, par respect pour ton travail les habitants de ton quartier vont acheter tes CD pour t'encourager.

Qu'elles solutions proposes-tu ?

La solution est là depuis. Il y a plus de 15 millions de tchadiens, concentrons-nous sur eux. Il faut des industries et même dans la musique, afin que l'univers du showbiz fonctionne bien.

Qu'est-ce que tu n'apprécies pas chez les acteurs du showbiz tchadien ?

Les acteurs du showbiz tchadien ne disent pas la vérité aux jeunes. Ils ne disent pas la vérité ni aux partenaires, ni aux mélomanes. Ils doivent le faire même quand c'est compliqué. Dire par exemple à un jeune qu'il n'est pas prêt pour le showbiz, dire aux partenaires : "gars j'ai besoin de vous comme vous de moi. Si vous me donnez ceci, voilà ce que je vous donne en retour". C'est pas de l'aide mais un échange de services. Aux mélomanes, leur demander si la musique qu'on fait plaît réellement ? Avouer que la musique a été composé par tel arrangeur, les paroles ont été écrites par tel musicien et la chanson a été produite par tel producteur. Malheureusement il manque beaucoup de sincérité et de loyauté et c'est cela qui décourage les investisseurs. Or sans investisseurs, il n'y a pas d'industrie musicale.

Quels sont les modèles qui t'ont inspiré ?

Dans ma carrière sur le plan international, je dirais Booba. Il est incarne l'industrie à lui seul. De Lunatic jusqu'à Ultra, ce mec a été simplement énorme et a su se réinventer au fil des années. Sur le plan africain, je dirais Stanley Enow. C'est un modèle africain dans l'industrie, il est actuellement l'un des artistes francophone qui vend le plus dans le monde. La musique a toujours été divisé en deux. Les artistes de festival et les artistes commerciaux. La différence entre les deux est que les artistes de festival sont ceux qui font de la musique de recherche, leur public est sélectif et raffiné. Si je devais les comparer, je parlerai comme Mawndoe : les artistes de festival jouent beaucoup sur l'emballage, le décor et rien de consistant à l'intérieur. Ils sont obligés de se réinventer tout le temps pour suivre le rythme. Malheureusement au Tchad tout est mélangé et les jeunes ne s'y retrouvent pas.

Quel type d'héritage comptes-tu laisser à la prochaine génération ?

L'héritage que je souhaite laisser à cette jeunesse c'est d'abord mon amour pour la musique, ensuite ma passion et enfin ma patience. Je le dis tout le temps aux jeunes : "n'essayez pas d'aller plus vite que la musique", laissez le succès venir vers vous. Seul le travail permet d'atteindre ses rêves. Il n'y a pas de raccourcis pour avoir le succès.



Pour toute information, contactez-nous au : +(235) 99267667 ; 62883277 ; 66267667 (Bureau N'Djamena)