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ANALYSE

Hausse des prix des hydrocarbures : quand gouverner par l'austérité est érigé en norme politique au Cameroun


Alwihda Info | Par Pr Mbida Onambele Max Zachée Saintclair, géostratège. - 9 Février 2024



Cette petite réflexion m'est inspirée par la récente actualité dominée par la hausse brutale et non négociée par le gouvernement de la République du Cameroun des prix des hydrocarbures à la pompe. Et comme si quelque chose urgeait et que le gouvernement était tenu par un malin génie, aussitôt les prix arrêtés aussitôt les pompes ont mis à jour les compteurs.

C'est la manœuvre de l'opportunisme économique. Cela s'entend. Cependant, la précipitation avec laquelle tout ceci est fait est assez surprenante et nous suggère un constat à deux niveaux. D'abord, l'idée que, le gouvernement a pris fait et cause pour l'asphyxie du peuple et que, de l'autre, le peuple a choisi de se laisser mourir.

1- L'austérité comme mode de gouvernement : le Cameroun, un Etat "populicide"
L'Etat du Cameroun a donc fait le choix d'asphyxier son peuple. C'est une affirmation grave. Sans doute. Mais elle est grave pour les yeux et les oreilles qui se refusent à la lucidité. Le rythme auquel les réformes unilatérales et ultralibérales se succèdent l'impose pourtant. Le Cameroun vient de connaître, en moins d'une année, une double hausse des prix des hydrocarbures. Et à chaque fois aucune mesure n'est prise pour atténuer les conséquences de ces décisions que tout le monde sait impopulaires et dont les conséquences sont terribles pour le peuple.

Dans la foulée, le pouvoir d'achat stagne quand il ne devient pas plus insignifiant, les coûts des transports augmentent, le panier de la ménagère s'amaigrit, les scolarités flambent, le prix du timbre fiscal s'affole, l'inflation s'épanouit, tout augmente, TOUT !!! Ce qui est intéressant c'est la manœuvre quasi-insolente avec laquelle le gouvernement opère. Sans consultation ni études contextuelles et sur le fondement d'arguments d'autorité, le Gouvernement assène ses mesures. Et l'âne de la fable est toujours tout trouvé, le contexte international.

Comme si le peuple était si idiot qu'il ne se demandera pas pourquoi la SONARA n'est pas fonctionnelle, pourquoi l'Etat ne fait aucun effort pour protéger le panier de la ménagère, pourquoi l'Etat ne s'impose pas à lui-même l'austérité qu'il fait peser sur le peuple. Mais tout ceci a une raison : l'Etat au Cameroun n'a pas de peuple. Nous vivons dans un pays où le gouvernement est dans sa réalité et gère une société qu'il refuse de connaître. Il enfle de son inertie et se gargarise de ses concubinages improductifs avec les institutions internationales qui le bercent de l'illusion détestable que le Cameroun ne peut survivre que de ses perfusions perfides.

En effet, alors que nous courons vers l'émergence, le Cameroun ne sait pas vivre sans les aides et les prêts. Tout se passe en réalité comme si l'Etat avait des priorités qui ne sont pas celles de sa population. L'Etat prête et s'empiffre et le peuple doit se débrouiller et se morfondre. Mais l'Etat a ses amours que tout le monde craint.

2- Un peuple sans âme républicaine : quand les abeilles et le Moulinex imposent le silence
Le peuple camerounais a abandonné sa responsabilité historique. Face à l'austérité et à ses conséquences, les camerounais ne savent pas se manifester et pleurent en silence. C'est à peine si en criant à la hausse des prix de la bière celle-ci est la consolation à laquelle le peuple sait finalement recourir.

Peut-être est-ce d'avoir appris à se laisser corrompre et à savoir se débrouiller. Peut-être aussi c'est à cause de s'être trop compromis, politiquement, d'avoir peur du parti, de ce qu'on va dire de nous qui sommes au pouvoir ou de nous qui sommes dans l'opposition. Le peuple a perdu le droit d'avoir le droit d'être le peuple, c'est-à-dire le propriétaire de la République, le garant de tout pouvoir. Le peuple a certainement raison.

Il écoute le gouvernement qui sait lui dire la vérité et rendre raison de ses misères. L'Etat est incapable, lui dit-on, parce qu'il y a la guerre en Ukraine et que Israël bombarde Gaza et que le blé a arrêté de pousser dans les champs ukrainiens et que le pétrole est trop cher à Washington et que Paris exige que les prix des carburants soient mis au même niveau qu'à Lyon et que Boko Haram joue au bandit-policier et que le soleil brille trop au-dessus de nos têtes et que, voyez-vous, le contexte international nous marque à la culotte !!!

Le peuple camerounais ne sait plus exiger de l'Etat de le nourrir, de l'éduquer, de le soigner, de le défendre, en somme... de faire son travail, le travail que lui a confié le peuple. Le peuple a aussi peur de perdre ses petits avantages, ce que l'Etat sait lui octroyer souvent quand il nomme un frère ou une sœur, un ami, une connaissance, le compagnon de quelque part.… il ne faut surtout pas que le panier tombe et se casse, tant que ce peuple-là mange.

Tant pis si de l'autre côté l'autre peuple avale la salive et quémande à l'humiliation le sou et le riz blanc. Parce que le peuple ne sait plus où il en est avec lui-même, s'il est un ou multiple, d'ici ou de là, avec lui-même ou sans son âme, rien, plus rien.



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