
Dans la majorité des établissements secondaires, aucun service dédié à l'orientation post-bac n'existe. Une enquête menée à l'Université de N'Djamena révèle que 70% des étudiants n'ont pas choisi leurs filières de manière autonome. Leurs décisions sont largement influencées par leur entourage, notamment la famille et les amis. Cette carence en structure d'orientation pousse un grand nombre de bacheliers à s'engager dans des parcours par défaut, plutôt que par réelle conviction, avec des conséquences durables sur leur avenir professionnel.
Plusieurs bacheliers reconnaissent avoir opté pour des formations inspirées par les souhaits de leurs parents ou par les choix de leurs amis. Les témoignages recueillis par Radio Ndarason et le N'Djam Post confirment que, faute d'un cadre de réflexion adéquat, beaucoup cèdent au suivisme et à la pression sociale. Résultat : des jeunes s'inscrivent dans des filières qui ne correspondent ni à leurs compétences ni à leurs aspirations.
Les contraintes financières, un obstacle majeur
Les contraintes financières aggravent encore cette situation. Les frais d'inscription à l'université, qui avoisinent les 50 000 FCFA, représentent un obstacle de taille pour de nombreuses familles. Certaines, en difficulté, sont même contraintes de suspendre, voire d'abandonner le parcours universitaire de leurs enfants. Cette réalité renforce le sentiment d'incertitude et de précarité chez bon nombre de bacheliers.
Comme le confie Adam Senoussi, bachelier : « Je ne sais pas encore ce que je veux étudier, j'attends les propositions de mes parents ou alors je choisirai une filière par hasard. » Toldé Désiré, enseignant-chercheur à l'Université de N'Djamena, analyse : « Trop souvent les choix d'orientation sont motivés par le suivisme, des rêves déconnectés de la réalité ou des pressions extérieures. »
Des initiatives encourageantes pour l'orientation
Face à ces défis, plusieurs initiatives émergent pour remettre l'orientation au cœur des préoccupations. C'est le cas de SENOBAT (Semaine de l'Excellence et de l'Orientation des Nouveaux Bacheliers Tchadiens), dont la 2e édition s'est tenue en août 2024 à N'Djamena sous le haut patronage de la présidence. Cet événement a rassemblé élèves, professionnels et anciens étudiants autour d'ateliers, de conférences et de séances de coaching individuel.
Autre exemple, la Journée Carrière 2025, organisée par l'ACEF-Tchad en avril dernier, au cours de laquelle sociologues, entrepreneurs et experts ont sensibilisé à une orientation éclairée et fondée à la fois sur les aptitudes cognitives et la réalité du marché du travail. De son côté, l'AJDDS a organisé en mai 2025 une caravane d'orientation qui a sillonné le pays, proposant conférences, conseils méthodologiques et soutien moral aux futurs étudiants.
Au Tchad, l'enjeu post-baccalauréat ne se limite donc pas à l'obtention du diplôme. Il réside aussi et surtout dans la pertinence du choix de filière, un choix trop souvent dicté par des influences extérieures ou des contraintes économiques. Le développement d'un véritable réseau national d'orientation et d'accompagnement pourrait transformer cette étape cruciale en un tremplin vers un avenir professionnel cohérent et durable pour la jeunesse tchadienne.