
Alors que certains parents soucieux inscrivent leurs enfants à des cours de vacances, dans des bibliothèques ou à des activités éducatives, d'autres, faute de moyens, se voient contraints de les orienter vers le petit commerce ou des emplois saisonniers.
Entre apprentissage et sacrifice : le dilemme des familles
Rosine, une sage-femme à la retraite, partage sa priorité : « J’inscris toujours mes enfants aux cours de vacances. Même si c’est cher, je me débrouille. Je veux qu’ils restent connectés à l’école. »
Cependant, le choix est plus complexe pour d'autres. Abakar, vendeur de friperie, explique son raisonnement : « Les cours d’été, ce n’est pas pour nous. On a à peine de quoi manger. Mon fils vend avec moi, il apprend le commerce. C’est aussi une forme d’éducation, non ? »
Malgré cette perspective, les spécialistes tirent la sonnette d’alarme. Le sociologue Mahamat Doungous avertit : « Le travail précoce prive les enfants de leur droit au repos, à la sécurité, et les expose parfois à des abus. Il freine leur développement et compromet leur réussite à long terme. »
Le travail pendant les vacances ne représente pas seulement un danger physique ; il est aussi une source de fracture scolaire. De nombreux enfants, une fois plongés dans cette routine, ne retournent plus à l'école à la rentrée. Pour les psychologues, les conséquences psychologiques peuvent être durables : manque de confiance, peur des adultes, repli sur soi. « L’enfant perd sa spontanéité, sa joie et devient adulte trop tôt », analysent-ils.
Théodore, père d’un garçon de 13 ans, partage son douloureux constat : « Au début, je pensais bien faire, mais quand mon fils est devenu amaigri et silencieux, j’ai compris mon erreur. Ce n’est pas parce qu’on est pauvre qu’on doit leur voler leur enfance. »
Vers des solutions durables et protectrices
Il est impératif de prendre des mesures concrètes pour protéger les enfants contre toute forme d’exploitation durant les vacances. Cela implique :
- La limitation du travail saisonnier dans le temps.
- L’interdiction des activités dangereuses ou inadaptées à leur âge.
- La sensibilisation des parents aux risques.
- La création de programmes de loisirs, d’apprentissage ou de formation adaptés à leur âge et à leurs besoins.
Zakaria, commerçant et père de famille, déplore le manque criant d'alternatives : « Si l’État créait des centres de loisirs ou de formation pour les vacances, je ne laisserais jamais mes enfants travailler dans la rue. Mais là, il n’y a rien, alors on se débrouille. »
Le commerce des enfants pendant les vacances est une réalité douloureuse, souvent passée sous silence. Il est urgent de mettre en place des structures d’accueil, des formations pratiques et des activités communautaires pour offrir aux jeunes Tchadiens un espace sûr, formateur et épanouissant. Les vacances ne doivent jamais devenir une saison d'exploitation, mais plutôt un temps de repos, de rêve et de croissance.