
Des rêves nourris par les études
Lorsque les étudiants obtiennent leur diplôme, ils portent l’espoir d’un avenir meilleur. Pour Amina, 24 ans, fraîchement diplômée en gestion des ressources humaines, la fin de l’université devait marquer le début d’un futur prometteur. « J’imaginais qu’avec mon diplôme, je pourrais rapidement commencer un stage, mettre en pratique ce que j’ai appris et, pourquoi pas, décrocher un emploi », raconte-t-elle. Mais ses attentes ont vite été brisées. Malgré des dizaines de dossiers déposés, aucune entreprise n’a accepté de l’accueillir.
Son histoire est loin d’être unique. Dans les rues de N’Djamena, dans les salles d’attente des administrations ou dans les cybercafés, de nombreux jeunes partagent le même désarroi. Ils découvrent que l’université ne suffit pas : le plus dur commence après.
Le mur invisible du parrainage
Un mot revient sans cesse dans les conversations : « parrainage ». Pour Idriss, licencié en droit, les choses sont claires : « Sans quelqu’un pour vous recommander, vous n’avez presque aucune chance. Quand je déposais mes dossiers, la première question était toujours : qui t’envoie ? »
Grâce à un oncle influent, Idriss a fini par obtenir un stage dans un cabinet juridique. Mais il reconnaît que cette opportunité n’est pas due à son mérite, mais à son réseau : « J’ai des amis plus brillants que moi, mais ils n’ont pas eu la même chance. »
Cette pratique, profondément ancrée dans les mentalités, alimente un sentiment d’exclusion. Fatimé, diplômée en communication, s’indigne : « Nous avons étudié des années durant, travaillé dur. Mais à la fin, ce qui compte, ce n’est pas ce que tu sais, c’est qui tu connais. C’est décourageant. »
Quand l’attente vire à la désillusion
Le temps qui passe finit par éroder les espoirs. Moussa, diplômé en économie, raconte : « Pendant deux ans, j’ai frappé à toutes les portes. On me disait toujours de revenir plus tard. J’ai fini par abandonner. Pour survivre, j’ai commencé à vendre des cartes de recharge téléphonique. Aujourd’hui, je n’ai plus la force de chercher. »
Ces cas sont fréquents. L’absence de stage provoque une spirale de découragement. Certains renoncent à leurs ambitions professionnelles ; d’autres se contentent de petits boulots précaires sans rapport avec leur domaine. Quelques-uns, plus chanceux ou plus obstinés, se tournent vers l’auto-emploi et créent de petites activités.
Des familles impuissantes face à l’impasse
Les parents, qui ont souvent sacrifié une grande partie de leurs maigres ressources pour financer les études de leurs enfants, se sentent trahis dans leurs espoirs. Le père de Sandrine, diplômée en informatique, témoigne : « J’ai tout donné pour ses études, pensant qu’elle décrocherait un emploi stable. Voilà deux ans qu’elle est à la maison, sans stage ni travail. »
La réussite scolaire, perçue comme une voie de promotion sociale, se transforme en source de frustration familiale lorsque la promesse d’un avenir meilleur n’est pas tenue.
Un problème collectif aux causes multiples
Derrière chaque histoire individuelle se cache une crise collective. Le manque de stages fragilise l’intégration professionnelle de toute une génération. Pour Mbaïrabé Marcel, assistant sociologue à l’Université de N’Djamena, « le premier stage est une étape cruciale. Sans lui, les jeunes restent dans la théorie et ne développent pas les compétences pratiques nécessaires. À long terme, c’est l’ensemble du pays qui en souffre. »
Les causes sont multiples : manque de structures d’accueil dans les entreprises, absence de dispositifs publics garantissant un premier stage, poids du clientélisme, et décalage entre les formations universitaires, souvent très théoriques, et les attentes du marché du travail.
La jeunesse en alerte
Face à cette situation, des voix s’élèvent. Oumar Abdoulaye, étudiant en Master et entrepreneur, plaide : « Les stages ne doivent pas être un privilège réservé aux mieux connectés. Chaque diplômé mérite une première chance. Sinon, nous allons créer une génération sacrifiée. »
Certains employeurs reconnaissent aussi leur part de responsabilité. « Nous recevons des centaines de demandes chaque année. C’est vrai que les recrutements se font souvent sur recommandation. Mais nous devons changer cela, avec l’appui de l’État et de politiques claires », admet un chef d’entreprise qui a requis l’anonymat.
Des pistes de sortie
Pour les spécialistes, des solutions existent : renforcer les partenariats entre universités et entreprises ; instaurer un programme national d’insertion garantissant un premier stage à chaque diplômé ; favoriser la transparence des processus de sélection ; encourager l’entrepreneuriat comme alternative pour les jeunes.
Selon Divira Céline, « tant que le parrainage restera la règle, nous gaspillerons le potentiel de notre jeunesse. »
L’espoir malgré tout
Malgré les obstacles, certains jeunes refusent de baisser les bras. Madjibeye, diplômée en informatique, raconte : « Après un an sans stage, j’ai décidé de me lancer avec quelques camarades. Nous avons monté une petite start-up de services numériques. Ce n’est pas facile, mais au moins nous travaillons dans notre domaine. »
Ces initiatives, encore fragiles, prouvent que la jeunesse tchadienne ne manque ni d’idées ni d’énergie. Ce qui lui fait défaut, c’est un système qui valorise le mérite et offre de vraies opportunités.
Une urgence nationale
La difficulté pour les jeunes tchadiens d’obtenir un premier stage n’est pas un simple problème individuel : c’est une crise nationale. Tant que le mérite restera relégué derrière le clientélisme, des milliers de diplômés continueront de sombrer dans la désillusion.
Investir dans des programmes d’insertion, ouvrir les portes des entreprises et instaurer la transparence sont des conditions indispensables pour redonner espoir à une jeunesse qui ne demande qu’à contribuer au développement du pays. Derrière chaque jeune en quête d’un premier stage, c’est une promesse de renouveau qui attend d’être tenue.
Lorsque les étudiants obtiennent leur diplôme, ils portent l’espoir d’un avenir meilleur. Pour Amina, 24 ans, fraîchement diplômée en gestion des ressources humaines, la fin de l’université devait marquer le début d’un futur prometteur. « J’imaginais qu’avec mon diplôme, je pourrais rapidement commencer un stage, mettre en pratique ce que j’ai appris et, pourquoi pas, décrocher un emploi », raconte-t-elle. Mais ses attentes ont vite été brisées. Malgré des dizaines de dossiers déposés, aucune entreprise n’a accepté de l’accueillir.
Son histoire est loin d’être unique. Dans les rues de N’Djamena, dans les salles d’attente des administrations ou dans les cybercafés, de nombreux jeunes partagent le même désarroi. Ils découvrent que l’université ne suffit pas : le plus dur commence après.
Le mur invisible du parrainage
Un mot revient sans cesse dans les conversations : « parrainage ». Pour Idriss, licencié en droit, les choses sont claires : « Sans quelqu’un pour vous recommander, vous n’avez presque aucune chance. Quand je déposais mes dossiers, la première question était toujours : qui t’envoie ? »
Grâce à un oncle influent, Idriss a fini par obtenir un stage dans un cabinet juridique. Mais il reconnaît que cette opportunité n’est pas due à son mérite, mais à son réseau : « J’ai des amis plus brillants que moi, mais ils n’ont pas eu la même chance. »
Cette pratique, profondément ancrée dans les mentalités, alimente un sentiment d’exclusion. Fatimé, diplômée en communication, s’indigne : « Nous avons étudié des années durant, travaillé dur. Mais à la fin, ce qui compte, ce n’est pas ce que tu sais, c’est qui tu connais. C’est décourageant. »
Quand l’attente vire à la désillusion
Le temps qui passe finit par éroder les espoirs. Moussa, diplômé en économie, raconte : « Pendant deux ans, j’ai frappé à toutes les portes. On me disait toujours de revenir plus tard. J’ai fini par abandonner. Pour survivre, j’ai commencé à vendre des cartes de recharge téléphonique. Aujourd’hui, je n’ai plus la force de chercher. »
Ces cas sont fréquents. L’absence de stage provoque une spirale de découragement. Certains renoncent à leurs ambitions professionnelles ; d’autres se contentent de petits boulots précaires sans rapport avec leur domaine. Quelques-uns, plus chanceux ou plus obstinés, se tournent vers l’auto-emploi et créent de petites activités.
Des familles impuissantes face à l’impasse
Les parents, qui ont souvent sacrifié une grande partie de leurs maigres ressources pour financer les études de leurs enfants, se sentent trahis dans leurs espoirs. Le père de Sandrine, diplômée en informatique, témoigne : « J’ai tout donné pour ses études, pensant qu’elle décrocherait un emploi stable. Voilà deux ans qu’elle est à la maison, sans stage ni travail. »
La réussite scolaire, perçue comme une voie de promotion sociale, se transforme en source de frustration familiale lorsque la promesse d’un avenir meilleur n’est pas tenue.
Un problème collectif aux causes multiples
Derrière chaque histoire individuelle se cache une crise collective. Le manque de stages fragilise l’intégration professionnelle de toute une génération. Pour Mbaïrabé Marcel, assistant sociologue à l’Université de N’Djamena, « le premier stage est une étape cruciale. Sans lui, les jeunes restent dans la théorie et ne développent pas les compétences pratiques nécessaires. À long terme, c’est l’ensemble du pays qui en souffre. »
Les causes sont multiples : manque de structures d’accueil dans les entreprises, absence de dispositifs publics garantissant un premier stage, poids du clientélisme, et décalage entre les formations universitaires, souvent très théoriques, et les attentes du marché du travail.
La jeunesse en alerte
Face à cette situation, des voix s’élèvent. Oumar Abdoulaye, étudiant en Master et entrepreneur, plaide : « Les stages ne doivent pas être un privilège réservé aux mieux connectés. Chaque diplômé mérite une première chance. Sinon, nous allons créer une génération sacrifiée. »
Certains employeurs reconnaissent aussi leur part de responsabilité. « Nous recevons des centaines de demandes chaque année. C’est vrai que les recrutements se font souvent sur recommandation. Mais nous devons changer cela, avec l’appui de l’État et de politiques claires », admet un chef d’entreprise qui a requis l’anonymat.
Des pistes de sortie
Pour les spécialistes, des solutions existent : renforcer les partenariats entre universités et entreprises ; instaurer un programme national d’insertion garantissant un premier stage à chaque diplômé ; favoriser la transparence des processus de sélection ; encourager l’entrepreneuriat comme alternative pour les jeunes.
Selon Divira Céline, « tant que le parrainage restera la règle, nous gaspillerons le potentiel de notre jeunesse. »
L’espoir malgré tout
Malgré les obstacles, certains jeunes refusent de baisser les bras. Madjibeye, diplômée en informatique, raconte : « Après un an sans stage, j’ai décidé de me lancer avec quelques camarades. Nous avons monté une petite start-up de services numériques. Ce n’est pas facile, mais au moins nous travaillons dans notre domaine. »
Ces initiatives, encore fragiles, prouvent que la jeunesse tchadienne ne manque ni d’idées ni d’énergie. Ce qui lui fait défaut, c’est un système qui valorise le mérite et offre de vraies opportunités.
Une urgence nationale
La difficulté pour les jeunes tchadiens d’obtenir un premier stage n’est pas un simple problème individuel : c’est une crise nationale. Tant que le mérite restera relégué derrière le clientélisme, des milliers de diplômés continueront de sombrer dans la désillusion.
Investir dans des programmes d’insertion, ouvrir les portes des entreprises et instaurer la transparence sont des conditions indispensables pour redonner espoir à une jeunesse qui ne demande qu’à contribuer au développement du pays. Derrière chaque jeune en quête d’un premier stage, c’est une promesse de renouveau qui attend d’être tenue.