Accueil
Envoyer à un ami
Imprimer
Grand
Petit
Partager
TCHAD

Tchad : loi de finances 2026, une réforme fiscale, numérique et économique de grande ampleur


Alwihda Info | Par Info Alwihda - 30 Décembre 2025


Adoptée le 26 décembre 2025, la loi de finances pour l’exercice 2026 constitue l’une des réformes fiscales et budgétaires les plus structurantes de ces dernières années au Tchad.


À travers un ensemble dense de dispositions, le législateur engage une transformation profonde du système fiscal, de la gestion budgétaire et des procédures administratives, avec pour objectifs affichés, l’élargissement de l’assiette fiscale, la modernisation de l’administration, la promotion des secteurs productifs et le renforcement de la transparence dans la gestion des finances publiques.

Sur le plan fiscal, la réforme de la taxe sur la valeur ajoutée occupe une place centrale. La loi clarifie et étend la liste des biens et services exonérés de TVA, en ciblant prioritairement les produits de première nécessité, les intrants agricoles, les équipements médicaux, les matériels destinés à l’élevage, à la pêche et à la transformation agroalimentaire, ainsi que les équipements liés aux énergies renouvelables.

Cette orientation traduit une volonté de soutenir le pouvoir d’achat des ménages, de renforcer la sécurité alimentaire et de réduire les coûts de production dans les secteurs stratégiques. Parallèlement, les taux de TVA sont réorganisés autour de trois niveaux : un taux normal de 17,5 %, un taux réduit de 9 % applicable à un panier élargi de produits locaux et de services d’hébergement et de restauration, et un taux zéro réservé aux exportations, aux transports internationaux et à certaines opérations aéronautiques.

La loi de finances 2026 marque également une rupture décisive avec les pratiques administratives traditionnelles à travers la généralisation de la digitalisation fiscale. La facturation électronique normalisée devient obligatoire pour une large catégorie d’opérateurs économiques, notamment dans le cadre des dépenses publiques, des exportations et des relations avec l’administration.

Désormais, la déductibilité de la TVA, le remboursement des crédits fiscaux, les déclarations et même les contrôles fiscaux sont conditionnés à l’utilisation du système e-Tax. Cette évolution confère aux documents électroniques une valeur juridique équivalente à celle des supports papier, et vise à réduire la fraude, améliorer la traçabilité des opérations et sécuriser les recettes de l’État. En matière de fiscalité indirecte, la loi renforce le régime des droits d’accises sur les produits jugés sensibles du point de vue sanitaire, environnemental ou social.

Les boissons sucrées, les alcools, les tabacs, certains produits cosmétiques, les emballages plastiques non récupérables et les véhicules de grosse cylindrée sont soumis à des taux révisés, parfois assortis de taxes spécifiques fixes. Une partie des recettes issues de ces prélèvements est affectée au financement de la couverture sanitaire universelle, traduisant une logique de fiscalité comportementale destinée à concilier mobilisation des ressources et objectifs de santé publique.

Le texte consacre par ailleurs un soutien affirmé aux secteurs productifs, en particulier l’agriculture, l’élevage et les énergies renouvelables. Les exonérations fiscales accordées aux machines agricoles, aux systèmes d’irrigation, aux équipements de transformation et aux intrants visent à stimuler la production locale et la valeur ajoutée nationale. Dans le même esprit, les équipements solaires et éoliens, les batteries, les panneaux photovoltaïques et même les véhicules électriques bénéficient d’exonérations ou d’abattements significatifs, illustrant l’engagement de l’État en faveur de la transition énergétique.

La création d’un crédit d’impôt pour la formation professionnelle, pouvant atteindre 35 % des dépenses engagées, renforce cette dynamique en encourageant l’investissement dans le capital humain. La loi de finances 2026 introduit également un encadrement plus strict des secteurs minier, douanier et financier.

Les exportations de substances minières sont désormais soumises à des obligations renforcées de paiement préalable des redevances, à une redevance statistique et à un contrôle accru via les plateformes numériques de l’État. Les banques, les sociétés de télécommunication, les commissionnaires en douane et plusieurs institutions publiques sont astreints à une interconnexion automatique avec les systèmes de l’administration fiscale, afin de faciliter le recoupement des données et lutter contre l’évasion fiscale et les flux financiers illicites.

Sur le plan budgétaire, la loi fixe les recettes de l’État pour 2026 à 2 275 milliards de FCFA, tandis que les dépenses sont arrêtées à plus de 2 530 milliards de FCFA, faisant apparaître un déficit budgétaire de plus de 255 milliards de FCFA.

Pour y faire face, le gouvernement est autorisé à recourir à des financements extérieurs et intérieurs, tout en renforçant la discipline dans l’exécution des dépenses publiques. La généralisation des paiements électroniques, l’encadrement strict des recrutements publics via le système intégré de gestion des finances publiques et la responsabilisation accrue des ordonnateurs et comptables publics participent de cette volonté de maîtrise budgétaire.

Enfin, la loi durcit sensiblement le régime des sanctions en cas de non-respect des obligations fiscales et numériques. Les défauts de déclaration, l’absence de facturation électronique, les retards d’enregistrement ou les manipulations frauduleuses des systèmes informatiques exposent désormais les contrevenants à des pénalités financières lourdes, à des interdictions d’exercer certaines activités et, dans certains cas, à des poursuites pénales.

En contrepartie, le texte renforce la sécurité juridique en clarifiant les procédures, en réduisant les délais de réclamation contentieuse et en consacrant la signature électronique comme équivalente à la signature manuscrite. Dans son ensemble, la loi de finances 2026 apparaît comme un texte de refondation, qui ambitionne de moderniser l’État tchadien, de renforcer la mobilisation des ressources internes et de créer un environnement plus transparent et plus favorable à l’investissement productif.

Si sa mise en œuvre effective constituera un défi majeur, notamment en matière d’appropriation des outils numériques par les acteurs économiques, elle pose néanmoins les bases d’un système fiscal et budgétaire plus cohérent, plus équitable et mieux adapté aux enjeux de développement du pays.



Pour toute information, contactez-nous au : +(235) 99267667 ; 62883277 ; 66267667 (Bureau N'Djamena)