Tchad : un accord de réconciliation signé à l'Est, 10 mois après des affrontements sanglants

Le nouveau gouverneur de la province de Sila, le général Abderaman Ali Mahamat, a scellé jeudi à Kerfi, un accord de réconciliation entre les communautés Mouro et Dadjo, près d'un an après les affrontements meurtriers qui ont fait de nombreuses victimes.

"Pour causes de querelles de limites territoriales, deux communautés (Mouro et Dadjo) s'étaient durement affrontées les 9 et 10 août 2019", relève le procès-verbal de règlement définitif de conflit intercommunautaire qui a été signé par 10 responsables administratifs, traditionnels et sécuritaires.

Le chef de canton de Bahr Azoum, Brahim Birke Bakhit, a déclaré que les cantons Mouro et Bahr Azoum forment une seule communauté. Il a indiqué que ce qui a eu lieu l'année dernière appartient au passé. Brahim Birke Bakhit a adressé ses remerciements au chef de l'État pour son implication dans la résolution des conflits, ainsi qu'au gouverneur qui, à peine nommé, s'est attelé à s'impliquer dans la réconciliation.

Le sultan de Dar Sila, Sa Majesté Seid Brahim Moustapha, s'est félicité de l'action du gouverneur qui intervient en à peine un mois de fonction à la tête de la province de Sila. "Nous voulons la paix dans ce pays", a dit le sultan de Dar Sila, Sa Majesté Seid Brahim Moustapha, qui a insisté sur l'unité et la paix entre les tchadiens.

Le représentant de la jeunesse de Kerfi, M. Sadam, a également fait une motion dans laquelle il a rappelé que la province a été touchée par des affrontements meurtriers. "Les efforts fournis par vos prédécesseurs sont énormes mais toujours inachevés. Mais aujourd'hui, grâce à votre engagement personnel et votre détermination, les deux communautés arrivent et acceptent de signer l'accord de réconciliation et d'enterrer la hache de guerre. La gestion de ce conflit était non seulement une préoccupation provinciale mais plutôt nationale", a-t-il dit.

Il a expliqué qu'en quatre jours, le comité de négociation et de réconciliation a pu mettre en accord les deux parties.

Le président du comité de négociation et de réconciliation entre les communautés Mouro et Dadjo, Boukhari Mahamat Djadi, s'est expliqué sur les coulisses des négociations qui ont abouties à l'accord. "Nous sommes venus le 6 juin 2020 (...) Si nous n'étions pas venus, ça aurait pu vraiment s'aggraver. Personne ne se saluait, chaque côté était prêt, sur la détente. Le même jour, quand nous sommes parvenus à trouver un terrain d'entente, tout le monde s'est salué chaleureusement", a expliqué le président de la commission de réconciliation.

Selon lui, si des négociations conduisant à un accord n'avaient pas abouties, la situation aurait été probablement "dangereuse" cette année.

Plusieurs points ont été évoqués lors des négociations, notamment la question de personnes incarcérées à Koro Toro suite aux affrontements et les couloirs de transhumance.

"Les conflits intercommunautaires qui opposent les Mouro et les Dadjo ont causé beaucoup de dégâts, beaucoup de pertes en vies humaines. Au mois de juillet et août 2019, ce conflit sanglant, meurtrier, ignoble a opposé des communautés sœurs liées par l'histoire et la géographie. Le bilan était catastrophique. (...) Devant cette situation grave, le président de la République Idriss Déby Itno a décidé de venir lui-même à Goz Beida", a relevé le gouverneur de la province de Sila, le général Abderaman Ali Mahamat.

Pour sa part, le préfet de département de Kimity, Adoum Hassan Fouda, a expliqué que 28 ethnies vivent dans la sous-préfecture de Kerfi, ce qui représente le Tchad en miniature. "Les deux communautés qui s'étaient affrontées sont restées sur leurs positions et s'observent en chien de faïence. (...) Les deux communautés ne peuvent indéfiniment rester dans cette position. Je pense que la raison a prévalu en ce sens que les démarches entreprises pour réconcilier les belligérants sont couronnées de succès", a-t-il souligné.

Après la cérémonie de réconciliation, le gouverneur de la province de Sila a tenu une rencontre avec les forces de défense et de sécurité. Il a donné des instructions très précises, rappelant que l'autorité de l'État doit être omniprésente.

Mahamat Issa Gadaya, envoyé spécial à Kerfi.