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RELIGIONS

Discours sur Noël au Tchad : le CSAI fustige des "voix enrouées" et recadre les propos d’Ansar As-Sunna


Alwihda Info | Par Alwihda - 30 Décembre 2025


Au Tchad, les récentes déclarations contenues dans le sermon du vendredi du président du mouvement Ansar As-Sunna Al-Muhammadiyya, le docteur Yahya Khalil Ibrahim, interdisant aux musulmans de participer aux célébrations de Noël aux côtés des chrétiens, ont suscité une vive réaction du Conseil supérieur des affaires islamiques (CSAI). Dans un communiqué officiel publié le lundi 29 décembre 2025, le président de l’institution, le cheikh Dr Mahamat Kathir Issa, a qualifié ces propos de « voix enrouées » cherchant à semer la discorde entre les fils et filles de la nation tchadienne.


Le CSAI s’est dit profondément préoccupé par la montée des discours de haine et des attaques verbales diffusées sur les réseaux sociaux, visant aussi bien des citoyens ordinaires que les plus hautes autorités de l’État. Selon le Conseil, ces dérives portent atteinte à la cohésion nationale et trahissent une méconnaissance de la réalité sociale et religieuse du pays. Le Tchad, rappelle-t-il, est une nation plurielle où cohabitent musulmans, chrétiens et adeptes des religions traditionnelles, tous égaux en droits, en dignité et en citoyenneté.

Dans son communiqué, le CSAI souligne que le président de la République est le président de l’ensemble des Tchadiens, sans distinction de croyance ou d’appartenance communautaire. Assimiler les relations pacifiques entre citoyens de confessions différentes à un acte de mécréance revient, selon l’institution, à exclure une partie de la population nationale et à fragiliser l’unité du pays.

Pour étayer sa position, le Conseil s’appuie sur les enseignements de l’islam et sur l’histoire islamique. Il rappelle que le Prophète de l’islam, paix et bénédiction sur lui, a affirmé une responsabilité universelle lorsqu’il a déclaré que chaque responsable est comptable de ceux placés sous sa charge, sans limiter cette responsabilité aux seuls musulmans. L’expérience de l’État de Médine est également citée comme exemple de coexistence, puisqu’il regroupait différentes composantes religieuses, dont des minorités juives, avec lesquelles le Prophète entretenait des relations sociales, répondait aux invitations et garantissait la protection, tant que les accords étaient respectés.

Le CSAI évoque aussi des figures majeures de l’histoire islamique, notamment le calife ‘Umar ibn al-Khattâb, qui, lors de la conquête de Jérusalem, assura la protection des églises et des chrétiens, illustrant ainsi les principes de justice, de tolérance et de respect des autres croyances. Ces références, selon le Conseil, démontrent que l’islam ne prône ni l’exclusion ni la haine, mais la coexistence pacifique et l’équité.

L’institution religieuse rappelle par ailleurs que le Tchad s’est illustré depuis plusieurs années comme un modèle d’harmonie nationale et de dialogue interreligieux, notamment à travers le Forum interreligieux initié sous le défunt président Idriss Déby Itno. Cette dynamique de paix et de cohésion, largement saluée, ne doit pas être remise en cause par des discours extrémistes cherchant à opposer les communautés.

Dans le même esprit, le Comité de la Fatwa du Conseil supérieur des affaires islamiques s’est prononcé sur la question des vœux de la nouvelle année, mettant un terme à une controverse persistante. Se fondant sur le Coran, le Comité rappelle que l’alternance des années constitue un signe de la miséricorde divine et une occasion de reconnaissance envers Allah pour Ses bienfaits.

La fatwa rejette clairement les avis interdisant aux musulmans de se souhaiter la bonne année ou d’adresser des vœux aux non-musulmans. Elle affirme qu’il est permis d’échanger des félicitations à l’occasion du nouvel an, sans distinction de religion. Pour les musulmans, cet acte s’inscrit dans la réjouissance de la grâce divine ; pour les non-musulmans, il relève du principe de bienfaisance et d’équité envers ceux qui vivent en paix avec les musulmans.

Le Comité précise enfin que ces échanges de vœux relèvent des relations sociales et non du dogme religieux. Ils ne constituent ni un acte cultuel ni une approbation d’une autre croyance, mais participent à la promotion du vivre-ensemble, de la cohésion sociale et de la paix, conformément aux finalités de la charia. Cette position, partagée par des savants contemporains d’Al-Azhar Al-Sharif, est désormais l’avis officiel retenu par le Comité de la Fatwa du CSAI.



Pour toute information, contactez-nous au : +(235) 99267667 ; 62883277 ; 66267667 (Bureau N'Djamena)