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INTERNATIONAL

« L'AGOA n'est pas une aide, elle porte sur le commerce »


Alwihda Info | Par Info Alwihda - 2 Octobre 2025


Il s’agit d’une déclaration faite par Pamela Coke-Hamilton, directrice exécutive du Centre du commerce international (ITC).


La Loi sur la croissance et les opportunités économiques en Afrique (AGOA), pierre angulaire du commerce entre les États-Unis et l'Afrique, expire aujourd'hui. Il est question d'un renouvellement, mais à ce jour, nous n'en savons pas plus.

Depuis un quart de siècle, l'AGOA permet un accès en franchise de droits au marché américain pour les marchandises provenant de 32 pays africains. Elle favorise ainsi la croissance économique, la création d'emplois et le renforcement des liens commerciaux.

Les pays éligibles en ont tiré parti à des degrés divers, mais dans l'ensemble, cet accord a été mutuellement bénéfique. L'expiration de l'AGOA serait un coup dur pour les pays africains qui subissent déjà le poids des nouvelles mesures commerciales, des derniers droits de douane aux exigences en matière de durabilité.

L'accès aux marchés clés devient de plus en plus difficile, et les pays africains, en particulier les moins développés, en ressentent les effets. Prenons l'exemple du Lesotho. Près de 60 % de ses exportations de vêtements sont destinés aux États-Unis, pour une valeur de plus de 230 millions de dollars par an. Dans le cadre de l'AGOA, ces produits entraient sur le marché américain en franchise de droits ; aujourd'hui, ils sont frappés d'un droit de douane de 15 %.

Ce taux peut sembler raisonnable en comparaison des 50 % initialement annoncés, mais cette mesure a entraîné des annulations de commandes, des pertes d'emplois et une baisse de la compétitivité par rapport aux pays voisins comme le Kenya et l'Eswatini, soumis à un taux de 10 %.

L'industrie textile du Lesotho emploie 40 000 personnes. Cette situation affecte de vraies personnes, de vraies vies. L'Afrique du Sud connaît une situation similaire. Les producteurs d'agrumes, qui représentent 140 000 emplois dans le secteur agricole, sont désormais soumis à un droit de douane de 30 % – le plus élevé du continent – qui s'ajoute aux droits de douane préexistants.

En ce qui concerne les voitures, selon nos données, les exportations de véhicules particuliers vers les États-Unis ont chuté de près de 40 % en glissement annuel au deuxième trimestre 2025. Nous estimons que les exportations globales du pays vers les États-Unis pourraient chuter de 17 % d'ici 2029. L'Afrique du Sud est le premier partenaire commercial des États-Unis sur le continent, ce qui aurait des répercussions sur les fabricants américains.

En ce qui concerne les secteurs, si l'AGOA n'était pas renouvelée, le secteur le plus touché serait celui de l'habillement et du textile. Nos données montrent que les droits de douane à eux seuls vont se traduire par une réduction des exportations des pays bénéficiaires de l'AGOA vers les États-Unis de 11 % d'ici 2029. Avec la fin de l'AGOA, ce chiffre atteindrait 21 %.

D'autres secteurs à forte intensité de main-d'œuvre, tels que le cuir, la chaussure, les produits alimentaires transformés et les boissons, risquent également de perdre du terrain. Dans une perspective future, il ne s'agira pas seulement d'une question de préférences perdues ou d'accès réduit au marché, il s'agira surtout d'un test sur les capacités de réaction des économies africaines.

Les pays africains peuvent saisir cette occasion pour s'engager pleinement dans la diversification au-delà des secteurs et des marchés traditionnels, la transformation des marchandises avant leur exportation et le renforcement du commerce au sein du continent. Il faut pour cela se projeter à long terme, et la Zone de libre-échange continentale africaine est notre meilleur outil pour y parvenir.

Elle peut ouvrir les marchés régionaux, attirer les investissements et réduire la dépendance vis-à-vis d'un partenaire commercial unique. Permettez-moi de conclure par cette remarque : l'AGOA n'est pas une aide, elle porte sur le commerce. Elle a profité à la fois aux exportateurs africains et aux fabricants basés aux États-Unis.

Il est grand temps que l'Afrique accorde la priorité à l'Afrique en renforçant les chaînes de valeur régionales et en veillant à ce que même les plus petites entreprises aient un rôle à jouer au cœur de cette transformation.



Pour toute information, contactez-nous au : +(235) 99267667 ; 62883277 ; 66267667 (Bureau N'Djamena)