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AFRIQUE

Soudan : le conflit s'intensifie après des massacres signalés à El Fasher, dans le Darfour


Alwihda Info | Par Mohaj Salaheldin, consultant, humanitaire et journaliste indépendant. - 11 Novembre 2025


Le conflit armé à El Fasher, capitale de l'État du Darfour-Nord au Soudan, a atteint un niveau de violence nouveau et alarmant, selon des informations crédibles indiquant que les Forces de soutien rapide (FSR), une force paramilitaire, ont tué au moins 1 500 civils après avoir pris la ville aux forces armées soudanaises.


UNICEF/Une femme fouille les décombres calcinés de son abri dans un camp de déplacés au Darfour, au Soudan.
UNICEF/Une femme fouille les décombres calcinés de son abri dans un camp de déplacés au Darfour, au Soudan.
La situation au Darfour, au Soudan, a pris une tournure dramatique. Des informations font état de massacres, d'agressions sexuelles et de destructions généralisées dans la ville d'El Fasher. Les Forces de soutien rapide (FSR), un groupe paramilitaire, ont pris le contrôle de la ville le 26 octobre dernier, remportant une victoire significative dans leur guerre de deux ans et demi contre l'armée soudanaise.

Des témoins oculaires décrivent des scènes d'une brutalité inimaginable : des civils abattus dans les rues, pris pour cible par des frappes de drones et écrasés par des camions. L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) estime que plus de 450 personnes ont été tuées, rien qu'à l'hôpital saoudien, et que beaucoup d'autres sont blessées ou portées disparues.

Selon plusieurs organisations humanitaires et de surveillance, ces morts s'inscrivent dans le cadre d'une « campagne d'extermination délibérée et systématique ». La prise d'El Fasher, après un siège de 18 mois, signale le contrôle quasi-total de la région du Darfour par les RSF et fait craindre des atrocités de masse, rappelant les phases précédentes du conflit du Darfour.

Le Haut-Commissaire des Nations-Unies aux Droits de l'Homme, Volker Türk, a condamné ces atrocités, déclarant que « des civils traumatisés sont toujours piégés à El Fasher et empêchés de partir ». L'ONU a reçu des « témoignages effroyables d'exécutions sommaires, de massacres, de viols, d'attaques contre des travailleurs humanitaires, de pillages, d'enlèvements et de déplacements forcés ».

Jusqu'à 200 000 personnes seraient encore piégées à El Fasher, avec un accès limité à la nourriture, à l'eau et aux soins médicaux. Plus de 89 000 personnes ont fui la ville et ses environs, et beaucoup sont arrivées à Tawila, une ville déjà submergée par l'afflux de personnes déplacées.

Principaux détails et impact humanitaire
L’analyse d’images satellites par le Laboratoire de recherche humanitaire de Yale révèle des amas d’objets pouvant correspondre à des corps humains, et une importante décoloration du sol autour d’El Fasher, corroborant les témoignages d’exécutions extrajudiciaires.

• Selon les organisations médicales, la ville a dénombré au moins 2 000 morts depuis sa prise de contrôle par les RSF.
• Les RSF auraient mené des raids de maison en maison, exécuté des civils le long des voies de fuite, attaqué des hôpitaux et perpétré des violences sexuelles généralisées, ciblant particulièrement les communautés non arabes.
• L’Organisation Mondiale de la Santé signale une attaque contre une maternité à El Fasher qui a fait au moins 460 victimes.
• On estime à 14 millions le nombre de personnes déplacées à l’intérieur du Soudan, ce qui en fait la plus grave crise de déplacements de population au monde.
• Le Conseil de sécurité des Nations-Unies a publié un communiqué de presse condamnant l’attaque, mettant en garde contre le « risque accru d’atrocités à grande échelle, y compris des meurtres à motivation ethnique », et exigeant de toutes les parties qu’elles protègent les civils et garantissent un accès humanitaire sans entrave.

Implications politiques et stratégiques
La chute d'El Fasher représente une victoire stratégique et symbolique pour les Forces de soutien rapide (FSR), éliminant le dernier grand centre urbain contrôlé par les Forces armées soudanaises (FAS) au Darfour. Les analystes avertissent que cette évolution pourrait accélérer la fragmentation du Soudan, ou provoquer une déstabilisation régionale accrue.

Le chef des FSR, Mohamed Hamdan Dagalo, a déclaré publiquement que l'unité nationale serait atteinte « par la paix ou par la guerre », s'appuyant sur les récents succès des FSR.

Appel à l'action
La crise humanitaire au Soudan est désormais aiguë. Selon l'OMS, les deux tiers des principaux hôpitaux sont hors service, et des millions de personnes sont menacées par la faim, les maladies et le déplacement.

La communauté internationale appelle à un cessez-le-feu immédiat et à un accès humanitaire sans entrave. Le Conseil des droits de l'homme des Nations-Unies a annoncé une session d'urgence le 14 novembre pour examiner la situation à El Fasher. Parallèlement, les appels se multiplient en faveur de la reddition des comptes, de sanctions et d'un embargo international sur les armes, alors que la situation humanitaire se détériore rapidement. Le conflit au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés, et a plongé le pays au bord de la famine. La situation à El Fasher rappelle de façon dramatique l'urgence d'une résolution pacifique du conflit, et la nécessité que les responsables des atrocités rendent des comptes.

Les témoignages des survivants et des acteurs humanitaires en première ligne illustrent une crise qui ne peut attendre. Des vies sont perdues, des familles déchirées et des communautés entières déplacées. Le monde ne peut rester les bras croisés.

Des familles déplacées ont fui El-Fasher pour se réfugier à Tawila, dans la région du Darfour Nord au Soudan. (Reuters : Mohammed Jamal)
Des familles déplacées ont fui El-Fasher pour se réfugier à Tawila, dans la région du Darfour Nord au Soudan. (Reuters : Mohammed Jamal)

Des réfugiés soudanais fuyant le conflit dans la région du Darfour trouvent refuge à Adré, de l'autre côté de la frontière, dans l'est du Tchad, où les conditions sont désastreuses et où la saison des pluies bat son plein.
Des réfugiés soudanais fuyant le conflit dans la région du Darfour trouvent refuge à Adré, de l'autre côté de la frontière, dans l'est du Tchad, où les conditions sont désastreuses et où la saison des pluies bat son plein.



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