
Dans les quartiers périphériques, la scène est devenue tristement banale : un malade inconscient, soutenu par deux proches, est hissé tant bien que mal sur une moto, avant d’être conduit vers l’hôpital le plus proche. Ce trajet périlleux se fait souvent sans assistance, sur des routes dégradées et au milieu d’un trafic chaotique.
« Quand une urgence survient, on n’a pas d’autre choix. Les gens appellent un taxi-moto, même pour une femme enceinte ou un blessé grave », explique Adoum Ahmed, habitant du quartier Digo.
La visite, début octobre, du président Mahamat Idriss Déby Itno dans deux grandes structures hospitalières de la capitale a mis en lumière l’ampleur des manquements : équipements vétustes, pénurie de personnel et absence de véhicules médicaux. Cependant, pour les habitants, ce constat n’est pas nouveau. Depuis des années, la question du transport sanitaire est reléguée au second plan, malgré les annonces de modernisation du système de santé.
À N’Djamena, la population s’interroge : comment parler de développement ou de réformes sanitaires quand aucune ambulance ne dessert les centres publics ? « On construit des bâtiments et des mosquées, mais pas de service d’urgence digne de ce nom », soupire Clarisse Naïnouba, une habitante du quartier Kabalaye.
Dans cette capitale en mutation rapide, où les infrastructures urbaines se multiplient, l’urgence se résume à « appelle la moto ». Comment comprendre que la santé publique se transporte à deux roues, alors que l’ambition architecturale ne manque pas ? Tant que les malades devront compter sur les moto-taxis pour espérer une chance de survie, la promesse d’un système sanitaire moderne restera une illusion.